Par CHENG HONGGANG*
L'opinion publique américaine et occidentale et la guerre de l'information contre la Russie se répéteront dans la compétition stratégique contre la Chine
Dans son livre de 1968, L'ordre politique dans une société en mutation, Samuel Huntington, l'un des plus grands politologues américains, a écrit : « Ce n'est pas l'agression d'armées étrangères qui constitue la principale menace pour la stabilité d'une société traditionnelle, mais l'invasion d'idées étrangères, où l'imprimé et la parole progressent de plus en plus. des armées et des chars. Huntington avait déjà un tel idées. sur le rôle de la diffusion des opinions à une époque où la presse et la radio dominaient la communication. La fin des années 1990 a montré un changement révolutionnaire dans la diffusion de l'information avec le développement rapide de la technologie. en ligne.
Les États-Unis et la Russie se disputent le domaine public et la morale
Afin de contrôler l'Europe, d'affaiblir la Russie et de stimuler l'expansion de ses exportations d'énergie et de son industrie militaire, les États-Unis encouragent un conflit militaire entre la Russie et l'Ukraine, en utilisant la propagande de l'opinion publique. Le gouvernement américain et l'opinion publique dominante ont coopéré pour diaboliser la Russie, et la « russophobie » a balayé le monde occidental alors que les États-Unis se présentent comme le « représentant de la justice » et le « défenseur de l'ordre ». Avant le déclenchement du conflit militaire russo-ukrainien, le gouvernement américain était ambigu sur la question de l'adhésion à l'OTAN et a exprimé un "ferme soutien" à l'Ukraine pour combattre la Russie, et les médias occidentaux encourageaient l'Ukraine à rejoindre l'OTAN.
Les États-Unis ont ignoré la proposition de la Russie de signer un traité de garantie de sécurité. Le gouvernement et les médias américains ont ignoré la proposition de la Russie de signer un pacte de sécurité, et tout le monde, du gouvernement aux médias, a encouragé « l'invasion » de l'Ukraine par la Russie. Les encouragements des États-Unis et de l'Occident ont poussé la situation à se détériorer, ce qui a finalement conduit la Russie et l'Ukraine à s'engager sur la voie de la guerre.
La Russie a utilisé un mélange de guerre d'opinion publique, de guerre psychologique, de guerre du renseignement et d'autres moyens pour soutenir « l'opération militaire spéciale » contre l'Ukraine. Avant l'opération militaire, la Russie a exagérément annoncé le retrait des troupes d'exercice de la frontière russo-ukrainienne, lançant un écran de fumée pour créer l'illusion que la situation était en train de se désamorcer ; après le début de l'offensive militaire, la Russie a exagéré la puissance de ses forces militaires et un grand nombre de Armée de l'eau en ligne[I] répandre le mythe « invincible » de l'armée russe sur les réseaux sociaux.
Après le début de l'offensive militaire, la Russie a exagéré la puissance de ses forces militaires et d'un grand nombre de structures. en ligne répandre le « mythe » de « l'invincibilité » de l'armée russe dans ses propres médias et sur les réseaux sociaux, avec l'intention de démoraliser la partie ukrainienne et d'influencer l'opinion publique internationale. Afin d'élever le niveau moral, la Russie a mené une campagne de communication internationale organisée et planifiée. Vladimir Poutine a prononcé plusieurs discours télévisés, dont un le 21 février qui impliquait un grand récit historique, cherchant une justification théorique et historique pour la prochaine "opération militaire spéciale".
Les efforts de sensibilisation de la Russie à l'échelle mondiale, principalement par La Russie d'aujourd'hui TV e Rosatom, ont été efficaces. Dans ses communications internationales, la Russie a pu aller au cœur du sujet, défendre et faire valoir ses arguments. Par exemple, il a révélé la fourniture d'armes américaines à l'Ukraine, qui a entraîné des morts et une catastrophe humanitaire dans l'est du pays ; propagé la menace à la paix posée par le déni par le gouvernement américain de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale et son soutien à la résurgence du nazisme ; expliqué la menace directe pour la sécurité de la Russie posée par la politique à long terme d'expansion vers l'est de l'OTAN ; et exposé la mauvaise conduite des États-Unis en se mêlant des affaires intérieures d'autres pays, en faisant des guerres et en luttant pour l'hégémonie.
En particulier, la campagne de propagande de la Russie sous la bannière de la « dénazification » est devenue une arme puissante pour rechercher le soutien de la communauté internationale, et de nombreux pays n'ont pas pris parti dans le conflit militaire russo-ukrainien. Selon une enquête du centre de recherche russe pris, le soutien à Vladimir Poutine en Russie a récemment augmenté à 83 %.
Les États-Unis et la Russie se bloquent mutuellement les médias en ligne
Dans le conflit militaire russo-ukrainien, les États-Unis ont arraché leur masque hypocrite de « neutralité et objectivité médiatiques » et leurs médias sont devenus un outil de manipulation politique nue au service de groupes d'intérêts. Sous la pression du gouvernement américain, des entreprises américaines, dirigées par plusieurs opérateurs Internet internationaux, ont lancé une campagne de déconnexion contre la Russie, imposant des sanctions et bloquant les médias russes à l'étranger. Apple, Intel, META, Amazon, Google, Microsoft, Netflix, Sony, TSMC et d'autres géants de la technologie ont émis des avis pour couper les approvisionnements et suspendre les affaires avec la Russie.
Auparavant, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait annoncé l'interdiction des médias russes, y compris La Russie d'aujourd'hui TV et Rosatom et ses filiales, d'opérer dans les pays de l'Union européenne. Les mesures de blocage occidentales contre les médias russes comprennent l'arrêt de la délivrance de certificats SSL à la Russie et l'arrêt de la location de ports et d'adresses IP à la Russie, c'est-à-dire l'arrêt de la maintenance des noms de domaine russes. Les comptes officiels russes sont pour la plupart "restreints" par des plateformes telles que Twitter, Facebook et YouTube, les sites vidéo YouTube et Apple ont interdit l'utilisation russe de leurs produits, et Google a interdit aux médias russes de mener des activités lucratives via ses applications.
Le 2 mars, la Russie a annoncé qu'elle était « prête à lancer un Internet souverain ». En effet, la Russie réagit depuis longtemps au blocus Internet de l'Occident : en mai 2019, Vladimir Poutine a signé la loi sur la souveraineté de l'Internet, qui propose d'établir un système Internet avec un nom de domaine national russe, permettant au trafic Internet d'être acheminé par le gouvernement. infrastructures maîtrisées. La Russie a également effectué plusieurs tests de déconnexion pour garantir le fonctionnement ininterrompu d'Internet en Russie en toutes circonstances.
Dans le même temps, la Russie a réagi fermement au blocus occidental des médias russes en imposant des restrictions appropriées à CNN, ABC, CBC et Bloomberg. En réponse à la couverture médiatique hostile de la Russie dans divers pays, la Russie a également pris des mesures correspondantes. Selon des agences officielles en Azerbaïdjan, le Service fédéral russe de surveillance des communications, des technologies de l'information et des médias de masse a interdit les activités de plusieurs sites de médias arabes bien connus, dont baku.ws, sur le territoire de la Russie.
Attaques de guerre sur Internet
Les cyberattaques ont atteint une ampleur sans précédent et ont joué un rôle important dans la rivalité militaire russo-ukrainienne et la guerre de l'information de l'opinion publique. Le type de cyberattaque était principalement une attaque par déni de service distribué (DDoS), et les deux parties ont achevé le déploiement de malware l'autre avant le conflit.
Le groupe international de hackers Témoignages a déclaré une « cyberguerre » contre la Russie, et 30 Rosatom partout dans le monde ont été attaqués par les Témoignages, entraînant des vitesses de circulation lentes. O Témoignages attaqué des milliers de sites Web et de systèmes russes, provoquant la fuite d'énormes quantités d'informations sensibles ; selon le département russe de la cybersécurité, depuis le début du conflit russo-ukrainien, les cyberattaques des États-Unis et des pays de l'UE représentent 28% et 46% des cyberattaques contre la Russie, ce qui a de graves répercussions sur les centres de contrôle spatial russe, la défense , l'énergie, la finance, les télécommunications et d'autres secteurs clés. Avec l'aide des États-Unis, le gouvernement américain a formé un réseau d'information "IT Corps", investissant beaucoup d'argent pour embaucher des cyber-talents étrangers et a mené une série de cyber-attaques en Russie.
La Russie a mené trois cyberattaques contre l'Ukraine avant "l'opération militaire spéciale". À partir de janvier 2022, la Russie a mené des cyberattaques à grande échelle sur des sites Web gouvernementaux liés aux secteurs diplomatique, éducatif, domestique, énergétique et autres. Au cours de la semaine qui a précédé le début de « l'opération militaire spéciale », la Russie a mené des cyberattaques contre des secteurs clés de la défense, des forces armées et des banques ukrainiennes, entraînant des fermetures et une paralysie généralisées de ces secteurs. Depuis le début de l'opération, la Russie s'est concentrée sur des attaques d'effacement de données sur des centaines d'ordinateurs du côté ougandais. La Russie déploie actuellement une mesure technique défensive appelée «géo-clôture"[Ii] pour empêcher l'intrusion de virus.
Les réseaux sociaux comme champ de bataille
Les médias sociaux ont montré une grande puissance dans le conflit militaire russo-ukrainien. Une fausse histoire de soldats ukrainiens mourant en masse sur une île de la mer Noire et une scène fictive d'une petite fille envoyant son père à la guerre ont «ému» de nombreuses personnes et alimenté la haine internationale contre «l'invasion» russe. Récemment, des informations sur la mort de centaines de personnes dans la petite ville de Buccha, dans la région de Kiev, ont été largement diffusées sur les réseaux sociaux, provoquant un tollé au sein de la communauté internationale et affecteront sérieusement les négociations en cours entre la Russie et l'Ukraine.
Selon divers médias étrangers, depuis le conflit militaire entre la Russie et l'Ukraine, la Central Intelligence Agency des États-Unis planifie et organise des groupes sociaux antirusses, des blogueurs auto-médias et des personnalités bien connues dans le monde entier pour diffuser une grande quantité d'informations. et des commentaires qui ne se distinguent pas de la vérité et qui salissent l'image internationale de la Russie. À son tour, «l'opinion publique» reflétée sur les médias sociaux a eu un impact significatif sur les décisions du gouvernement. Par exemple, la décision du gouvernement américain d'interdire les importations de pétrole russe a été largement influencée par l'opinion publique aux États-Unis. Le gouvernement allemand, sous la pression de l'opinion publique, augmente son aide en armement à l'Ukraine.
La Russie attache depuis de nombreuses années une grande importance au développement du pouvoir des médias sociaux, investissant massivement dans les médias numériques et les armées en ligne. Le concours d'opinion publique sur les médias sociaux ne se limite pas au pays, il s'étend également à de nombreux pays, cultivant l'opinion publique pro-russe de diverses manières, telles que l'enseignement de la langue russe, les centres culturels, les médias gratuits et les salons d'art. Malgré le désavantage évident de la communication internationale de la Russie par rapport à l'Occident, au milieu du conflit militaire russo-ukrainien, un grand nombre d'armées en ligne des pro-russes ont émergé dans de nombreux pays à travers le monde, formant une force d'opinion publique internationale liée à la maison et à l'étranger par solidarité avec la Russie et condamnant les États-Unis et l'OTAN pour leur ingérence dans le conflit russo-ukrainien, obtenant un impact favorable sur la Russie image internationale.
Aperçus de la guerre de l'information sur l'opinion publique américano-russe
L'opinion publique américaine et occidentale et la guerre de l'information contre la Russie se répéteront probablement dans la compétition stratégique contre la Chine. Le conflit militaire russo-ukrainien est devenu un outil de plus pour les politiciens anti-chinois aux États-Unis et en Occident pour exploiter le problème et attaquer la Chine. L'opinion publique américaine et occidentale émet l'hypothèse que « la Chine est le complice de la Russie » ; que la Chine et la Russie forment un soi-disant « axe du mal » ; que le conflit russo-ukrainien a été utilisé pour faire connaître la question de Taiwan ; et que la « menace de force » de la Chine contre la mer de Chine méridionale était exagérée. Ceci est un exemple de la façon dont le gouvernement américain a organisé une Armée de l'eau en ligne d'attaquer et de vilipender la Chine, ce que nous ne devons pas sous-estimer.
Premièrement, ce conflit militaire russo-ukrainien a révélé les lacunes et les insuffisances de la Russie en matière de technologie Internet. La Russie doit encore importer 90 % de ses puces civiles, et l'utilisation des puces dans les équipements électroniques militaires est évidemment en difficulté. Le développement de trois grandes sociétés Internet russes, Yandex, Vkontat et Mail.ru, est depuis longtemps au point mort au niveau national et a une influence internationale limitée. La croissance saine des entreprises stratégiques basées sur Internet est d'une importance stratégique critique et significative.
La chose la plus importante à l'heure actuelle est d'établir un mécanisme de développement de marché sain et efficace pour les entreprises de haute technologie Internet, de promouvoir le développement coordonné et intégré des entreprises privées et gouvernementales; renforcer la systématisation et les règles juridiques pour les entreprises Internet de haute technologie et améliorer le niveau d'utilisation et de gestion d'Internet ; et encourager les sociétés Internet à participer davantage à la coopération et à la concurrence internationales et à élargir les marchés étrangers. L'objectif principal est d'améliorer dès que possible la capacité indépendante et autonome de la science et de la technologie Internet chinoises et de maîtriser la technologie de base entre nos propres mains, afin de faire face au siège et aux attaques à grande échelle menés par les États-Unis et l'Ouest américain dans le domaine de la haute technologie en Chine.
Deuxièmement, à une époque de changements soudains de la situation internationale et de vents contraires, il est crucial de maintenir la cohésion interne et la force centripète d'une société. Il faut reconnaître que la propagande confuse des États-Unis et de l'Occident a toujours un marché en Chine, et des voix qui flattent aveuglément les États-Unis, louent les valeurs occidentales et désignent l'Occident comme « représentant la justice » apparaissent fréquemment dans les médias. Nous devons vigoureusement renforcer la promotion des valeurs fondamentales socialistes du point de vue de la propagande et de la gouvernance de l'opinion publique, promouvoir la culture traditionnelle, comprendre pleinement les grandes réalisations de construction de la Chine et renforcer la confiance en soi.
Comprendre pleinement la véritable nature de l'hégémonie américaine et améliorer sa capacité à distinguer le bien du mal, afin que, dans l'environnement international complexe, l'opinion publique puisse jouer un meilleur rôle en soutenant les principales actions stratégiques diplomatiques de la Chine, en sauvegardant les intérêts nationaux fondamentaux et en faisant respecter les principes de l'équité et la justice internationales.
Dans l'environnement international complexe, l'opinion publique doit jouer son rôle en soutenant les principales actions stratégiques diplomatiques de la Chine, en sauvegardant les intérêts nationaux fondamentaux et en faisant respecter les principes d'équité et de justice internationales. Dans le même temps, il est nécessaire de renforcer la légalisation et la gestion scientifique de l'opinion publique, à la fois pour créer un environnement détendu pour l'opinion publique et pour guider activement l'opinion publique et réprimer résolument la diffusion d'informations indésirables qui nuisent au pays et à la société . .
Une fois de plus, le conflit militaire russo-ukrainien nous a rendus plus conscients de l'importance du renforcement des capacités de communication internationale et de la maîtrise du discours international. La Chine possède le plus grand groupe d'internautes au monde, un grand nombre de professionnels des médias et des plateformes de communication bien développées pour divers types d'opinion publique. Actuellement, il doit avoir une vision plus large et se concentrer sur la construction de plates-formes de communication mondialisées.
Premièrement, des efforts doivent être faits pour construire une série de groupes de communication de nouveaux médias avec une influence mondiale, former un système de communication moderne avec un développement diversifié et intégré, et améliorer la puissance de communication, la crédibilité et l'influence des médias chinois dans le monde.
Deuxièmement, il devrait étudier sérieusement les caractéristiques et les règles de la communication de l'opinion publique internationale, améliorer les méthodes et approches de communication, travailler sur la précision et l'efficacité pour différentes régions, pays et publics, et bien raconter l'histoire de la Chine.
Troisièmement, nous devons accorder une attention particulière à la culture et à l'utilisation des médias sociaux. Les médias sociaux, avec leurs avantages uniques d'étendue, d'actualité et de transnationalité, jouent un rôle de plus en plus important dans la communication internationale et doivent être pleinement utilisés sur les fronts nationaux et internationaux. Quatrièmement, bien que la communication internationale soit supprimée par l'encerclement des États-Unis et de l'Occident, nous ne pouvons pas abandonner le marché dans les pays occidentaux et devons continuer à rechercher des percées et à nous efforcer d'avoir une plus grande pertinence dans les positions de l'opinion publique occidentale.
Dans le même temps, la communication internationale devrait accorder plus d'attention au grand nombre de pays en développement favorables à la Chine et adopter divers moyens pour étendre le marché des médias dans les pays en développement : échange de médias et coopération au niveau gouvernemental, investissement dans l'industrie des médias des pays concernés ; participer à la concurrence sur le marché des médias, en approfondissant les relations avec les ONG et les groupes sociaux amis de la Chine ; travailler en profondeur avec des célébrités et des Chinois d'outre-mer pour construire une base large et stable de l'opinion publique en Chine et élargir l'atmosphère de l'opinion publique internationale favorable à la Chine.
* Cheng Honggang est professeur d'informatique à l'Université du Sichuan (Chine).
Traduction: Arthur Scavone.
Publié à l'origine sur Groupe de réflexion Taihe
notes
[I] Le terme « armée de l'eau en ligne » fait référence à des groupes de personnes qui sont payées pour publier des commentaires sur Internet. Ces travailleurs à temps partiel ou à temps plein utilisent les sites de médias sociaux, les forums et les blogs pour influencer l'opinion publique. Ils publient des messages positifs sur les entreprises qui les emploient et s'en prennent à leurs concurrents. Ils créent souvent plusieurs comptes pour diffuser le même message, donnant l'impression qu'il existe un consensus général sur une question.
[Ii] GEO-FENCING implique l'utilisation de la technologie et de la géolocalisation qui permet de connaître l'emplacement et l'heure déterminés à partir des données des téléphones portables connectés à Internet.
