Par FRÉDÉRIC LYRA*
Le principal pari électoral du camp présidentiel dirigé par le président Emmanuel Macron était que la gauche apparaîtrait divisée dans la lutte pour l'espace au Parlement.
Après un Premier article posté sur le site la terre est ronde ce qui peut être traité comme une hypothèse, nous continuerons dans ce texte en décortiquant brièvement quelques personnages de ces dernières élections législatives et de la société française contemporaine plus généralement.
Nouveau Front Populaire
Comme mentionné précédemment, le principal pari électoral du camp présidentiel dirigé par le président Emmanuel Macron était que la gauche apparaîtrait divisée dans la lutte pour l’espace au Parlement. Cela garantirait que votre groupe politique ne serait pas à ce point affaibli et que les causes prédéterminées qui mèneraient nécessairement à l'élection du RN seraient toutes mises sur le compte de la gauche – ou du moins partagées avec le président. C’est exactement le contraire qui s’est produit. Ce qui semblait impossible quelques jours auparavant s'est rapidement réalisé et le 10 juin, le Nouveau Front Populaire [Nouveau Front Populaire ou NFP].
Un nouvel espoir électoral est apparu à l'horizon du pays, car il était urgent de contenir, à gauche, la montée de l'extrême droite. Alors que tous les électeurs suivaient passivement les complots à travers les médias et les réseaux sociaux, après une série de négociations rapides, les partis de gauche sont parvenus à une alliance qui s'est matérialisée dans un programme politique générique mais très complet, ce à quoi personne ne s'attendait, y compris eux. .
Cette alliance était saine, urgente et nécessaire, même si même ses militants percevaient cette union comme un mariage forcé et pratiquement de courte durée. En fin de compte, la durée et la cohérence de ce regroupement importaient peu, c'était ce qu'il fallait faire et cela suffisait. C'est sur cet arrangement que Macron et le RN ne comptaient pas et, comme l'a révélé la séquence, la présence de ce nouveau Avant a rendu les élections moins prévisibles. Le NFP réalise la fusion de quatre partis politiques : LFI, PS, EEVL et PCF.
Le programme présenté tournait autour de l'idée de reconstruire l'État social, mais en se concentrant sur la défense du pouvoir d'achat et des salaires des travailleurs, en mettant l'accent sur la proposition d'augmenter effectivement le salaire minimum. L’État social devrait à nouveau être présent sur tout le territoire, sans oublier le «quartiers populaires» et les territoires d’outre-mer. Le PFN a pris position contre les discriminations à l'égard des femmes, le racisme, l'antisémitisme et l'islamophobie, pour la défense du climat et des êtres vivants et pour la défense de la République contre la menace néofasciste qui planait dans l'air.
Dans la société, il régnait une méfiance, assez fondée, à l'égard de la position qu'occuperait le leader de LFI, Jean-Luc Mélénchon, au sein du parti. Avant. On a imaginé qu'en tant que personnalité personnaliste, qui divise radicalement les opinions dans tous les domaines politiques, certaines positions du NFP pourraient être compromises ou déformées par les médias et les opposants en fonction du contenu et de la forme de leurs interventions publiques constantes. Cela a failli ne pas se produire.
L’ambivalence d’un tel leadership était présente tout au long de la campagne. Aucune erreur ne serait pardonnée, même si sans lui et son charisme à l'ancienne Le PFN n’aurait guère pu en arriver là. Autrement dit, d'un côté, il y avait un goût amer selon lequel l'alliance aurait pu aller plus loin, de l'autre, contre toute attente, elle a réussi à arriver en première place. Le fait que Macron ait inversé le résultat des élections ne diminue en rien cette réussite.
Nous ne détaillerons pas le programme NFP rédigé en quelques jours et présenté sous la forme d'un document de vingt-six pages avec 150 mesures de nature différente (parmi lesquelles la suppression de la loi sur l'immigration approuvée en janvier 2024). Cependant, il convient de souligner qu'il a cité les actions à entreprendre au cours des quinze premiers jours de la « rupture » des gouvernements qui seraient mises en œuvre par l'acte de « déclarer l'état d'urgence sociale ».[I]
Pour une analyse de ce qu'est un État d’urgence sociale voir le désormais classique « Alarme incendie dans le ghetto français »[Ii] de Paulo Arantes, dans lequel il est clair que « l’état d’urgence » peut être compris de plusieurs manières : d’abord comme davantage de pouvoir de l’État. Ce qui implique davantage de répression, comme l’a toujours rimé État social, et semble rimer de plus en plus avec État policier.
Après tout, la protection sociale signifie davantage de programmes sociaux et, pour ainsi dire, davantage de protection de la société contre elle-même. Un exemple en est la présence croissante des policiers les plus divers dans la vie quotidienne de toutes les villes françaises – un phénomène qui s'est intensifié avec les Jeux olympiques, mais qui s'est produit avant. Ensuite, la suppression temporaire (ou permanente ?) de certaines lois (ou de la constitution elle-même) en raison d'une nécessité politique exceptionnelle et, enfin, cela peut devenir un autre nom pour une situation révolutionnaire. Reste à savoir laquelle de ces trois significations générales Nouveau Front Populaire avait en tête lorsqu'il parlait de vouloir briser le dispositif des décrets d'urgence sociale pendant les quinze premiers jours d'un hypothétique gouvernement.
Après avoir été battu lors de la nomination du Premier ministre, le NFP doit tenter de survivre car il s'agit essentiellement d'une alliance de convenance qui a montré une certaine force électorale, bien que sans grande cohésion interne et politiquement faible, avec peu de choses à faire. faire du positif au Parlement autre que réagir au gouvernement.
En revanche, un point positif que l’on peut tirer de la constitution de cette alliance temporaire réside dans les différents collectifs qui ont émergé et se sont organisés à travers le pays au cours du processus électoral dans le but de faire campagne dans leurs quartiers, souvent à l’écart des appareils du parti. Certains signes indiquent que cette mobilisation va se poursuivre au-delà des élections, peut-être que quelque chose pourra ressortir de ces nouvelles rencontres, souvent inattendues.
Banlieues
«Je n'ai pas peur et je n'en peux plus», telle une affirmation courante que l'on entend dans les «quartiers populaires», comme on appelle les quartiers populaires en marge des grandes villes, les banlieues. C'est dans ces lieux que sont hébergées une grande partie des immigrés venus des anciennes colonies ou des départements français d'outre-mer. En général, les habitants de banlieues sont moins impliqués dans les élections, même s’il existe des signes d’une participation croissante des jeunes.
Dans ces régions, notamment dans le «quartiers populaires« Parisiens, LFI a réussi à augmenter considérablement son nombre de voix. L'un des principaux électeurs du parti de Jean-Luc Mélénchon est constitué par les classes populaires des métropoles. Son discours s’est avéré capable de capter les voix de ceux qui sont ou non les plus touchés par la pauvreté, la précarité et la violence d’État. Dans ces régions, personne n'a été vraiment surpris par la réelle possibilité de victoire du candidat du Rassemblement National [IA].
Le sentiment est que le moment de ce destin pressenti depuis longtemps était enfin arrivé. C’était une question de temps et le président n’avait fait qu’avancer l’horloge. Bien que nombreux soient ceux qui se sont vigoureusement engagés dans le barrage électoral de l'extrême droite, personne ne croit vraiment que cela suffise à arrêter la propagation de la répression et de la xénophobie dans la société française.
Beaucoup de choses pourraient et devraient être dites sur la vie et la situation des banlieues. Nous insisterons encore sur un seul point. Les discours et pratiques de haine font déjà partie de la réalité quotidienne de ces populations, la plus grande crainte de ces habitants est une intensification de ce qui est déjà, d'une certaine manière, donné. Les violences policières existent déjà, mais elles peuvent toujours augmenter. Ce qui se profile à l'horizon est une intensification et une amélioration des politiques actuelles de gestion des populations marginalisées, qui tendent à s'accentuer avec l'aggravation de la crise politique, sociale et économique dans laquelle est plongé le pays, sans aucune perspective d'autre solution que l'aggravation de la situation. situation.
Il convient toujours de garder à l’esprit que le vieux désir exprimé par l’extrême droite d’expulser tous les immigrés du pays semble pratiquement irréalisable à la lumière de la structure contemporaine du capitalisme français. Le pays est totalement dépendant du travail précaire et souvent illégal des immigrés. Dans une large mesure, une partie de la solution pourrait être d’une autre nature. Enfin, il convient de noter que pendant la période électorale et avec la victoire du RN à l'horizon, l'une des plus grandes craintes qui ont prévalu parmi les policiers et les maires était une explosion immédiate d'émeutes radicales à travers le pays. après la victoire qui n'a pas eu lieu.
Deux ou trois fractures ?
Tout le monde semble unanime pour considérer que le résultat du processus électoral a démontré que la France était divisée en trois blocs politiques plus ou moins équivalents : la gauche (NFP), le centre (Ensemble) et d'extrême droite (RN). L'une des rares voix dissidentes est celle du géographe Christophe Guilluy, inventeur du concept de « France périphérique », titre d'un ouvrage, et auteur de plusieurs ouvrages à succès comme « French Fracture ».[Iii].
Selon Christophe Guilluy : « il n'y a pas trois blocs [politiques], mais deux, les métropoles contre la France périphérique ».[Iv] Peut-être pouvons-nous introduire une certaine nuance et dire que, si au niveau institutionnel il semble effectivement y avoir trois blocs qui se disputent le pouvoir de manière asymétrique, il existe une division territoriale, culturelle et sociale représentée (mais non réduite) par l'opposition croissante entre les Français. métropoles et périphéries.
Il convient de rappeler que, dans la conceptualisation de Christophe Guilluy, la périphérie a un sens différent de celui du Brésil. Le concept n’indique pas les communautés périurbaines, comme les favelas réparties à travers le Brésil. Comme nous l'avons vu, leurs équivalents structurels sont appelés en France banlieues. Les périphéries françaises seraient les petites villes, les villages et les zones rurales où vivent les petits propriétaires terriens et où, selon lui, les vrai perdants de la mondialisation. Ce clivage établit, dit-il, la séparation politique fondamentale de la France contemporaine.
Cela implique de dire que le banlieues – et c’est là toute la difficulté épistémologique de l’idée du géographe –, les zones les plus violentes et les plus ségréguées du pays et où se concentre la majorité de la main-d’œuvre immigrée et les plus grandes poches de pauvreté, seraient du côté des vainqueurs – bien qu’en absolu négatif – de cette nouvelle équation sociale française. Autrement dit, selon Christophe Guilluy, le banlieus sont beaucoup plus intégrés que périphéries. Que l’on soit d’accord ou non avec cette idée, le fait est que l’État ne manque pas dans ces lieux, au contraire, il est présent en excès.
D’un côté, l’État trop présent a de nombreuses conséquences néfastes et, dans ces conditions, peut-être – mais peut-être seulement ? – il vaudrait mieux ne pas avoir autant d’État, d’autre part, la déstructuration effective de ces localités rend difficile de les considérer comme appartenant au côté gagnant du processus d’effondrement social. Malgré cette difficulté, l'équation posée par Christophe Guilluy montre que le gouvernement direct des territoires analogue aux banlieues Les territoires français dans le monde sont plus importants pour le cours du capitalisme mondial que les territoires analogues périphéries Le français
Cela semble à première vue un constat quelque peu évident, compte tenu de la centralité que gagne l’espace métropolitain, mais ce n’est pas ainsi que la gauche française le vit car pour elle la fracture raciale est apparue comme plus fondamentale. Chose vérifiable au Brésil, où la fracture raciale tend à coïncider avec la fracture territoriale, mais qui a du mal à se maintenir en France, car là-bas la majorité des zones périphériques, toujours aux yeux du géographe, sont blanches, comme elles le sont, malgré tout, la majorité de la population du pays.
Loin de moi l'idée de relativiser le racisme dans la société française, le problème est de l'envisager principalement à travers des théories conçues pour penser la situation nord-américaine. C’est-à-dire des idées développées dans un pays où le passé esclavagiste est interne à sa constitution, alors que la colonie était la contrepartie nécessaire du capitalisme français, mais qui se structurait en dehors de son territoire. Au banileues Ils sont le résultat d’un processus historique qui a introduit une fracture au sein du pays, auparavant principalement extérieure.
S’il est vrai que Christophe Guilluy n’en tient pas compte, il est possible, à partir de sa théorisation, de donner une apparence concrète à une configuration sociopolitique complexe qui lui est propre. L’État, en revanche, a rapidement disparu ou s’est reconfiguré de manière nettement fragmentaire dans les territoires qu’il appelle périphériques. En fait, la thèse défendue par le géographe depuis plus de vingt ans s'est renforcée après les élections, car la principale division des voix aux élections législatives était territoriale. Le résultat du premier tour l’a clairement montré.[V].
Il est difficile de nier que cette fracture soit un facteur déterminant dans la configuration politique de la France contemporaine. Il convient de noter qu’il existe une division institutionnelle fondamentale des votes qui se manifeste territorialement, ce qui donne un certain pouvoir aux grotões et aux régions périphériques pour intervenir plus fermement dans la politique nationale. Il s’agit d’une division qualitative, et d’une certaine manière démocratique, qui divise les représentants de telle sorte que les métropoles, bien qu’elles concentrent tout le pouvoir économique et incarnent le mode de vie contemporain, courent le risque d’avoir proportionnellement moins de représentation. Le risque de perdre le contrôle du pays est grand. Ce qui contrebalance cette situation, c'est la densité démographique des métropoles et de leurs environs. Le RN l'a emporté largement dans les régions périphériques, c'est-à-dire dans la majeure partie de la France. C’est là le nœud du problème.
Métropole et/ou contre Périphérie
La « majorité ordinaire », dit-il, est plus préoccupée par les problèmes de survie immédiate que par la politique institutionnelle. Le résultat électoral pourrait être interprété comme une tentative inconsciente de répondre au processus de destruction de la société, aujourd'hui mené par le établissement progressiste qui, à son tour, considère ces classes moyennes populaires comme archaïques et comme l'incarnation du retard économique et surtout culturel du pays.[Vi]
Bien que numériquement majoritaire, la France périphérique se retrouve opprimée face au modèle mis en mouvement par ce qu’elle identifie comme l’élite, représentée par une France métropolitaine et mondialisée qui, bien que minoritaire, concentre les richesses et le pouvoir politique, culturel et médiatique. Il n'hésite pas à identifier dans cette division une dualité structurelle entre deux mondes distincts, qu'il nomme en plaisantant Métropole e Périphérie. Outre la fracture territoriale fondamentale, dit-il, cette dualité matérialise une fracture entre deux formes de vie (c'est principalement dans cette dimension que l'on comprendrait mieux pourquoi le banlieues se situent paradoxalement du côté gagnant du processus).
Derrière le discours multiculturel des élites multiculturelles, il y aurait un refus de reconnaissance et un mépris de la culture des autres, de ce qu'il appelle la « culture populaire » (une culture populaire bien différente de ce qu'on entend au Brésil avec le même terme qu'en France). (en général, il indique principalement ce que consomment les classes les plus populaires, et moins ce qu'elles produisent). L'hégémonie culturelle, dit-il, est au cœur de ce mode de vie métropolitain.
Même si le processus de « périphéralisation » française (en empruntant ici le terme à Paulo Arantes qui dans l’essai Fracture brésilienne dans le monde[Vii] fait référence non seulement à la France mais aussi à Christophe Guilluy lui-même), c'est-à-dire un mouvement de désintégration sociale centripète dans le pays, qui dure depuis le milieu des années 1980, avec la crise de 2008, ce processus s'est aggravé et accéléré. Gouverné sous le règne d’une austérité aveugle et avec des arguments pour réduire les dépenses sociales et structurelles, toute présence de l’État est éliminée, transformant la vie quotidienne des populations périphériques en souffrance continue.
Pratiquement tous les services administratifs sont devenus virtuels et anonymes, sans possibilité d’assistance humaine pour aider à résoudre les problèmes immédiats, rendant les procédures incompréhensibles pour le citoyen ordinaire qui doit déchiffrer les normes et règles dictées par des bureaucrates absolument inconscients des réalités locales. Entre autres choses, la crise a servi de prétexte à une série de réformes administratives qui ont centralisé davantage les différents services administratifs, les retirant des petites villes et les concentrant dans les grandes villes.
Depuis lors, plusieurs villes petites et moyennes se sont effondrées économiquement, ont vu leur vie culturelle s'effondrer et ont souffert d'une précarité aiguë, voire de la destruction, de ce qui restait des structures de l'ancien État social. Les fermetures arbitraires d’hôpitaux, de banques, de bureaux de poste, d’écoles, d’entreprises et de maternités sont de plus en plus courantes. Même la suppression des distributeurs automatiques de billets est devenue un problème social. Ce qui reste debout annonce déjà une naissance dans le paysage des ruines de la modernité, accompagnée d'un sentiment de nostalgie illusoire de fin du monde, mais avec une certaine dose de concret.
Après tout, si les Trente Glorieuses n'étaient qu'un mirage et ont été longtemps laissées pour compte, le fondement idéologique selon lequel ces populations vivraient dans une société d'abondance et de consommation illimitée gouverne encore les cœurs et les esprits, même si le portefeuille ne suffit plus. pour autant – d'ailleurs une autre limite de Guilluy est de croire qu'il y aurait moyen de reconstruire un modèle proche de celui de cet âge d'or et, en outre, que cela aurait été le vrai visage de la société française et non une brève parenthèse d'après-guerre.
À tout cela s’ajoute, au fil des années, une politique de démantèlement systématique des lignes ferroviaires locales, nécessitant un recours croissant à l’automobile et allant de pair avec l’augmentation du prix des carburants. C'est précisément l'étincelle qui a déclenché le mouvement de gilets jaunes[Viii] fin 2018, bien avant que les prix n’explosent après la guerre en Ukraine. Le problème des transports, parmi bien d’autres, accentue la fracture entre les deux pôles structurels de la société française, rendant pratiquement impossible l’adaptation des zones périphériques aux normes et pratiques qualifiées d’éco-responsables par le nouveau jargon.
Quelque chose qui, du point de vue des habitants de Paris et des autres régions métropolitaines, est de plus en plus inacceptable et inacceptable.trograde. "Fin du monde, fin du mois, même combat", a crié le Gilets jaunes. En effet, dans une société en crise chronique et permanente, la durée du mois et l’heure de la fin du monde tendent, de plus en plus vite, à coïncider complètement.
Mouvement radical né de la France périphérique en novembre 2018, le gilets jaunes elle atteint son apogée insurrectionnelle quelques semaines plus tard, début décembre, lorsque deux grandes manifestations stoppent Paris, occupant même l'avenue des Champs-Elysée et détruisant plusieurs magasins et même une partie de l'Acro de Triomphe ; ce qui a laissé la bourgeoisie et une partie de l’élite économique et intellectuelle qui y vit, qui n’a visiblement pas rejoint le mouvement, acculées et effrayées. L’espace d’un bref instant, l’idée de Révolution a semblé refaire surface.
Dès le début, le gouvernement a été contraint de prendre des mesures exceptionnelles, presque toujours violentes, pour contenir la fureur populaire qui a éclaté et qui ne sera définitivement contenue qu’en mars 2020 avec l’annonce du confinement pour cause de pandémie de Covid-19. Pendant près d'un an et demi, tous les samedis à Paris et dans les principales villes du pays ont eu lieu des manifestations et des affrontements avec la police. On peut dire beaucoup de choses sur gilets jaunes, à commencer par son intensité et ses nouvelles pratiques et contenus politiques.
L’un des aspects les plus intéressants du mouvement était sans doute son mutisme et sa volonté explicite de ne négocier sous aucun prétexte avec le gouvernement. Il n’y avait pas d’agenda ni de revendications claires et aucune direction n’était autorisée à représenter le mouvement. Rien ne devait être concédé. Une partie considérable de la population tenta de se séparer de l'État et de la nation. Un autre aspect important et ambigu est qu'en réalité gilets jaunes ils étaient majoritairement constitués de la majorité blanche et précaire de la population – une alliance avec des mouvements composés d’immigrés arabes et noirs a même été envisagée au début des manifestations, mais a rapidement été avortée en raison de l’intervention de la police.
Les énormes contradictions du mouvement et son manque d'orientation claire étaient des signes qu'il était en quelque sorte en phase avec l'époque du monde. Une partie considérable de la gauche officielle était perplexe et ne comprend toujours pas et refuse de penser et de montrer une quelconque affinité ou solidarité avec le mouvement. Une partie de l’extrême gauche, cependant, voyait dans l’ambiguïté complexe de gilets jaunes la matérialisation d’une insurrection radicale et l’horizon renouvelé d’une révolution avortée. Illusion ou pas, l’important est que l’idée et la possibilité d’un tel événement imprègnent à nouveau l’imaginaire politique et social – notamment de l’État français qui, depuis, n’a cessé de multiplier les mesures anti-insurrectionnelles et d’exception.
Gauches, droites et vice versa
Ceux que Christophe Guilluy identifie comme métropolitains trouvent dans les différents maires du parti écologiste (EEVL) répartis sur tout le territoire, et surtout, dans la figure de la maire de Paris, Anne Hidalgo, les plus grands symboles d'un nouveau mode de gouvernement qui combine technocratie et mesures écologiques pour s’adapter à la crise budgétaire et climatique. Un mode de gouvernement qui mérite d'être discuté en détail, mais qui a malgré tout pour principale conséquence déclenché un processus de gentrification qui, mené principalement par la gauche, a expulsé les gens de la capitale, comme le note la géographe Anne Clerval. .[Ix]
Saint-Ouen, ville au nord de Paris, ancienne ville ouvrière et où a été construit le village olympique, est un cas emblématique de cette démarche. Considérée comme un « nouvel eldorado pour les classes moyennes supérieures », la ville souffre d'un processus de vidage de ses écoles, les nouveaux habitants préférant les écoles privées. Cela n'est pas tant dû à une éventuelle différence de qualité de l'enseignement, comme c'est le cas au Brésil, car il existe encore une équivalence entre les écoles publiques et privées, la raison principale, du moins c'est ce que dit un article récent du ActuParis, ce sont des parents qui cherchent à empêcher leurs enfants de grandir dans les mêmes classes que les plus pauvres – généralement racialisés.[X].
La maire Anne Hidalgo a déclaré dans une interview avec Le Monde que « Paris se présente comme la ville de toutes les libertés, la ville refuge des LGBTQI+, une vie où les gens vivent ensemble, une ligne où il y a une maire femme, de gauche, en plus de celle d'origine étrangère et binationale, comme mais aussi féministe et écologique ».[xi]
Cependant, tout cela n’a pas pu empêcher l’expulsion de plus de 12 XNUMX personnes de la capitale et de ses environs, dans un processus connu sous le nom de « nettoyage social », qui a forcé le déplacement d’immigrés, de mendiants et de certains des plus pauvres (y compris des étudiants). ) ) qui vivent dans des logements sociaux pour que tout reste brillant pour les Jeux Olympiques[xii], un processus qui s'est accompagné d'un renforcement sans précédent des technologies de surveillance et des contrôles de population dans les périmètres urbains (avec 45 XNUMX policiers, en plus des forces militaires déjà traditionnelles qui patrouillent dans les villes de la zone urbaine). vigipirate[xiii], directement impliqué dans les jeux)[Xiv].
Appareil qui, comme déjà annoncé, ne sera pas désactivé après les jeux[xv]. Jusqu’à présent, la gauche institutionnelle n’a pas réussi à résoudre cette nouvelle équation politico-sociale dans laquelle elle se trouve, consciemment ou non, objectivement engagée, contribuant ainsi à l’exclusion croissante d’une partie considérable de la population. Dans la synthèse de Le Monde Diplomatique: « L’avenir appartient au citoyen éco-responsable, qui se déplace à vélo, mange des légumes bio, privilégie les trajets courts et… élève sa vertu coûteuse au rang d’impératif moral. Cette nouvelle modernité progressiste, que l’austérité confine aux métropoles, renvoie des pans entiers du monde populaire à l’obsolescence.»[Xvi]. De toute évidence, les voitures, les métros, les trains et les avions continuent d’être utilisés pour les trajets sur de plus longues distances. Après tout, la fin imminente du monde n’a obligé personne, pas même les éco-responsables, à arrêter de travailler ou à annuler ses vacances.
Selon Christophe Guilluy, pour l'essentiel, le PFN et le Ensemble ils représenteraient deux parties de ce même mode de vie. De façon très schématique, l'un serait l'héritier de la vieille petite bourgeoisie où l'on retrouve des artistes, des intellectuels et des petits fonctionnaires et l'autre de la haute bourgeoisie, incluant une partie des patrons et hauts fonctionnaires des entreprises et des employés de l'Etat, en plus des retraités. De manière provocatrice, il identifie qu’il y aurait un continuum libéral réel, bien que caché, entre les deux groupes, l’un à prédominance culturelle et l’autre plus économique.
De manière générale, ils partageraient même la perspective d’un mépris du mode de vie de ce que Christophe Guilluy appelle les classes populaires. Tous deux n’écoutent pas et n’ont pas grand-chose à dire sur l’angoisse et les peurs ressenties par la partie périphérique de la population dans son expérience de désintégration sociale. En l’absence de quoi que ce soit à proposer concrètement, la gauche et la droite libérales ont tendance à distribuer des leçons de morale, renforçant le mépris irrité envers ceux qui se sentent de plus en plus exclus du jeu.
Quelque chose qui serait quelque peu normal du point de vue de la droite libérale macroniste, mais qui, du fait du manque de réflexion, ainsi que de l'adhésion explicite d'une partie de la gauche au cours du monde, finit par aggraver l'écart entre cette dernière et et les parties périphériques de la société qui pourraient très bien être les destinataires de vos idées.
Ainsi, insiste Christophe Guilluy, même si ces aspects ne peuvent être négligés, le vote majoritaire au RN ne doit pas être compris comme une adhésion totale aux idées et au programme du parti, il serait surtout la matérialisation d'un symptôme de quelque chose de bien plus profond qu'il ne touche. au bas des structures sociales du pays. Cela ne manque pas d’offrir une certaine ouverture à des changements radicaux d’un côté ou de l’autre dans une société qui s’érode rapidement. On peut dire que tant que la gauche majoritaire ne déchiffrera pas le mouvement gilets jaunes et continuent de craindre et de mépriser ces populations, elles continueront à être exclues du jeu.
Rassemblement National
Si le RN, à l'époque où on l'appelait Front National, était contre l'Union européenne et la mondialisation, il défend maintenant quelque chose comme une Europe forteresse[xvii]. Quoi qu’il en soit, une grande partie de l’augmentation des voix et de la crédibilité acquise par le RN est due au fait qu’il a abandonné le parti. Frexit – un hypothétique équivalent français de le Brexit. Hormis le changement de nom et l’abandon de ce programme controversé, peu de choses ont changé au sein du parti. Sa nature originelle reste la même. Ce qui a changé, ce sont les efforts efficaces pour intégrer et participer activement au jeu institutionnel national et continental. Pour ces raisons et d’autres encore, nombreux sont ceux qui comparent Marine Le Pen à Giorgia Meloni., l'actuelle Première ministre italienne, qui est en fait en train de répéter une révolution dans son pays et, qui sait, sur le continent.
Bien que pertinente, la comparaison oublie que l'Italienne est déjà intégrée depuis longtemps et joue le jeu institutionnel dans un parcours ascendant qui l'a conduite au sommet du pouvoir de son pays. Elle est une initiée de établissement. D’ailleurs, son récent rapprochement avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, semble être un signe clair de la fusion et de l’indistinction croissante entre les pôles autrefois d’extrême centre et d’extrême droite – ou néo-fascisme – au sein de l’Union européenne. Union. La Française, en revanche, provoque encore un certain malaise public chez ceux qui se trouvent photographiés en sa compagnie ; pour l’instant, il vaut mieux continuer à la rencontrer en coulisses – même s’il est vrai qu’Emmanuel Macron et d’autres hommes politiques peuvent déjà annoncer publiquement qu’ils lui parlent au téléphone de temps en temps.
Pour ces raisons et d’autres, il était nécessaire qu’une jeune figure soit à la tête de la liste européenne, représentant le renouveau du parti, qui sait, devenant Premier ministre dans la brèche ouverte par Macron. Jordan Bardella, qui est également président du parti dont il est membre depuis 2012, après avoir été président de sa jeunesse, Nation de génération (Génération nation), est né dans la banlieue nord de Paris. Il est originaire de Seine Saint-Denis, le département le plus pauvre et le plus violent de France, et ce n'est pas un hasard si l'un des endroits où la densité d'immigrés et de personnes en situation de précarité est la plus élevée du pays.
Jordan Bardella ne fait pas exception à la règle, étant le descendant d'une mère italienne et d'un père ayant la double nationalité : italienne et franco-algérienne (il est intéressant de noter que l'un des points les plus controversés de son programme était celui qui remettait en question et mettait en péril la statut juridique des citoyens ayant une double nationalité travaillant pour l'État français). Après la séparation de ses parents, Jordan Bardella a commencé à vivre avec sa mère dans un logement social et dans une situation relativement précaire.
En revanche, la bonne situation financière de son père lui permettait d'avoir accès à une éducation privée, à des voyages aux États-Unis, à une nouvelle voiture et à un appartement. Avant de diriger la liste RN pour les élections européennes, Bardella avait déjà été député européen au sein duquel il faisait partie du groupe proche du Premier ministre hongrois Viktor Orban, le plus grand représentant de l'extrême droite européenne, avec lequel il s'est aligné contre un soutien militaire. pour l'effort de guerre, contre l'immigration clandestine, pour la défense de la famille traditionnelle et pour l'assouplissement des restrictions socio-environnementales imposées par l'UE aux entreprises et à ses États membres.
Jordan Bardella possédait une chaîne YouTube sous le pseudonyme « Jordan9320 » (93 fait référence au code postal de Sain-Denis), où il partageait des vidéos de ses sessions de jeu vidéo. Appel du devoir. Les orientations politiques l'ont obligé à laisser de côté cette chaîne et à la remplacer par une chaîne politique commune, dans laquelle on retrouve, entre autres, ses discours publics. Aux yeux de la société française, Jean-Marie Le Pen est toujours apparu comme un personnage repoussant, Marie Le Pen a toujours été traitée avec suspicion, Jordan Bardella apparaît pourtant comme un Français ordinaire, une personne comme les autres.
Le fait est que le RN a obtenu deux fois plus de voix que les macronistes aux élections européennes et, comme nous l’avons déjà souligné, il est devenu le parti le plus important en France. Ce résultat n’est pas sorti de nulle part. Aux élections de 1988, le RN (alors FN) obtient près de 15 % des voix, sa moyenne depuis. Seul Sarkozy, qui en 2007 a rapproché son discours et ses pratiques de ce que tout le monde imaginait Jean-Marie Le Pen, a réussi à abaisser cette moyenne des voix.
La montée du parti d'extrême droite coïncide avec la restructuration productive du capitalisme français, dont la principale étape est la délocalisation de la majorité de l'appareil de production industrielle du pays. Il n’est pas surprenant que le nord-est du pays, autrefois zone hautement industrialisée, et le sud-est, où se sont installés bon nombre de ceux qui ont immigré après la guerre d’Algérie, soient deux des plus anciens bastions de l’extrême droite française. C'est dans le Sud-Est que Félicien Faudy a mené une vaste enquête sociologique sur l'évolution historique du vote d'extrême droite, articulant enjeux économiques, politiques et raciaux.
Une recherche récemment publiée dans un livre qui a eu un impact bien mérité du fait de sa parution peu avant les élections européennes, aborde dans son titre deux points cruciaux : Des électeurs ordinaires. Enquête sur la normalisation de l'extrême droite [Électeurs ordinaires. Enquête sur la normalisation de l'extrême droite.[xviii] L’une est la normalisation de l’extrême droite, et l’autre la notion de ordinaire, terme qui mériterait une étude propre de la critique des idéologies car il est mobilisé par plusieurs chercheurs et idéologues (comme Jordan Guilluy lui-même, synthèse des deux) pour désigner non seulement les électeurs du RN, mais aussi les militants du parti. de nouveaux mouvements comme le gilets jaunes et les agriculteurs qui se sont rebellés début 2024 dans toute l’Europe contre les mesures protectionnistes de l’Union européenne (ou leur absence).
La plus grande force des recherches de Faudy est de montrer que la montée de l'extrême droite et, surtout, l'adhésion d'une partie de la population à cette position politique sont dues non seulement à des enjeux moraux, économiques et structurels mais aussi au fait qu'elles faire l’expérience d’une société qui s’est orientée vers la droite. Autrement dit, et pour simplifier grandement le raisonnement, il s’agit avant tout d’une adhésion au cours du monde.
Quoi qu’il en soit, il est également vrai que l’extrême droite est entrée dans le vide laissé par la désindustrialisation et le chômage de masse. Le vote exprime une double position de ces électeurs. D’une part, une haine envers les élites mondiales, les intellectuels et les dirigeants dont ils ressentent le mépris et l’oppression,[xix] de l’autre, la haine et le racisme contre les immigrés et les Français d’origine africaine et surtout arabe. L’islamophobie n’est pas nouvelle, mais elle a pris une ampleur considérable après les attentats du 11 septembre contre les tours jumelles et, surtout, après les attentats de Paris en 09. C’est devenu une pratique et un discours officiel, guidant les mesures politiques.
Dans son roman historique sorti fin août, Les Derniers Jours du Parti Socialiste [Les derniers jours du Parti Socialiste], l'écrivain Aurélien Bellanger insiste, de manière assez controversée dans un ouvrage de fiction littéraire, sur le fait qu'une part considérable de ce processus de montée de l'islamophobie et de montée du racisme dans le pays a été menée et induite par la gauche. Il existe également un nationalisme croissant qui s’exprime même dans les produits alimentaires. Les produits fabriqués dans le pays ont désormais leur propre sceau qui met en valeur et encourage la consommation de ces produits comme un fait de distinction éthique et de solidarité avec la société à travers la consommation.
La croissance du RN coïncide également avec le fait que le PS et le PCF ont abandonné toute pratique d'opposition et de critique du capitalisme, depuis l'élection de François Mitterrand, sans oublier qu'une grande partie de la viabilité et de la légitimation que le RN trouve aujourd'hui dans Cette journée est due à l’effort déployé par feu François Mitterrand pour garantir démocratiquement que les voix fascistes soient entendues sur un pied d’égalité.
Ouverture ou fermeture d'horizon ?
Nombreux sont ceux qui ont connu une ouverture effective des horizons politiques avec une réelle possibilité de victoire du RN. A l'issue du premier tour des législatives, seul un Français sur deux craignait une victoire du RN. Après les élections, pendant les semaines d'indécision du président quant au choix du nouveau Premier ministre, les enquêtes ont montré que ce nombre n'avait pas diminué.
Emmanuel Macron a voulu donner la parole à la société française, il a réussi, le message qui est arrivé était un peu attendu, même si ce n'était pas ce que lui et l'autre moitié de la société, qui appartient à un autre monde social, aimeraient entendre. Le premier tour des élections législatives a connu une forte participation de 66,7% au scrutin, la plus élevée depuis 1997. Le résultat a démontré qu'il existe une présence effective et quelque peu hégémonique du RN sur la quasi-totalité du territoire national, à l'exception de Paris. et sa région métropolitaine, ainsi que dans les plus grandes villes du pays. Par exemple, historiquement centriste et avec une certaine inclination à gauche, la région Bretagne a voté, notamment dans ses communes rurales, majoritairement en RN. Ce qui était également nouveau, c'était l'importance des voix que le Sud-Ouest accordait au parti d'extrême droite.
Cependant, les horizons politiques des électeurs ne laissent pas entrevoir la possibilité d'améliorer leur vie avec un éventuel changement radical de gouvernement. Rares sont ceux qui semblent encore nourrir une telle illusion. Ce qui semble exister, c’est un désir partagé par ceux de la périphérie de renverser la situation, pour enfin intervenir directement dans le jeu politique qui leur semble de plus en plus lointain, comme une manière de marcher de manière autonome et en dehors de la société. Il y aurait un mélange de revanchisme et d’enthousiasme pour l’inconnu, qui s’accompagnerait de fatalisme et d’une volonté de bouleverser démocratiquement la vie nationale.
Ils sentent, consciemment ou non, qu’une nouvelle dynamique objective les menace lorsqu’elle transforme la société en une guerre sociale qu’ils ne veulent évidemment pas perdre. D’un côté, ils semblent exiger qu’une solution soit trouvée à la crise sociopolitique – même si cela nécessite, entre autres choses, l’accomplissement du sort sinistre qui semble avoir été scellé pour les immigrants racisés.
D’un autre côté, ils agissent comme s’ils voulaient entraîner le reste de la société, notamment les élites économiques et culturelles, de droite ou de gauche, au fond du gouffre dans lequel ils se trouvent déjà et d’où ils se sentent ils ne s'échapperont plus. Ce serait peut-être la dernière manière catastrophique d'imposer un destin commun à tous les citoyens du pays. Comme personne ne peut sortir de la situation chaotique dans laquelle ils se trouvent, ils optent pour une socialisation du malheur. Ils en avaient marre d'attendre.
A noter que si cette interprétation est au moins partiellement correcte, le message délivré par les électeurs semble aller dans le sens inverse de celui porté par le RN. Cette dernière a concentré ses efforts sur l'intégration et la participation à sa manière au établissement institutions françaises et européennes, et pourrait ainsi devenir, qui sait, une nouvelle élite dirigeante. Le retourner, voire le faire exploser, semble avoir disparu de l'horizon du parti d'extrême droite. Cela ne s'est pas encore produit cette fois-ci, mais face à cette avalanche qui arrive, la large gauche semble avoir peu à offrir au-delà des bonnes manières ; Il y a peu de gauche politique, pas de nouvelles idées ou pratiques pour contrer ou peut-être intervenir et rediriger cette vague radicale qui vient principalement d’en bas.[xx]
*Frédérico Lyra est professeur aux départements d'art et de philosophie de l'Université de Picardie Jules Verne (France).
Pour lire le premier article de la série, cliquez sur https://aterraeredonda.com.br/eleicoes-na-franca-uma-vitoria-que-nao-houve/
notes
[I] Pour lire l'intégralité du programme, voir : https://assets.nationbuilder.com/nouveaufrontpopulaire/pages/1/attachments/original/1719575111/PROGRAMME_FRONT_POPULAIRE_2806.pdf?1719575111
[Ii]Arantes, Paulo, « Alarme incendie dans le ghetto français » Le Nouveau Temps du Monde, São Paulo, Boitempo, 2014, p.
[Iii]Cf : Guilluy, Christophe, La France périphérique : commentaire sur un sacrifice des classes populaires (Paris, Flammarion, 2014) et Fractures françaises (Paris, Flammarion, 2013).
[Iv]Cf : Guilluy, Christophe, « Il n'y a pas trois blocs mais deux, les métropoles contre la France périphérique », le Figaro, 15 juillet 2024.
[V]Les différentes cartes officielles indiquant les partis vainqueurs dans chaque circonscription lors des différentes phases de l'élection peuvent être consultées ici : https://www.data.gouv.fr/fr/reuses/cartes-interactives-des-resultats-des-elections-legislatives-2024/
[Vi]Cf : Guilluy, Christophe, Pas de société. La fin de la classe moyenne occidentale, Paris, Flamarion, 2018.
[Vii]Arantes, Paulo Eduardo, La fracture brésilienne dans le monde. Visions du laboratoire brésilien de la mondialisation , São Paulo, 34, 2023.
[Viii]La bibliographie est déjà immense, voir par exemple : Leoni, Tristan, sur les Gilets Jaunes. Deux trop de réalité (Genève, Entremondes, 2023). Le peu d’attention que les Gilets jaunes ont reçu au Brésil en dit long sur la situation actuelle de la gauche brésilienne.
[Ix]Clerval, Anne, Paris sans le peuple. La gentrification de la capitale, Paris, La Découverte, 2016.
[X]Cf: https://actu.fr/ile-de-france/saint-ouen-sur-seine_93070/mon-fils-a-perdu-la-moitie-de-ses-copains-la-seine-saint-denis-veut-mettre-fin-au-boycott-de-ses-colleges_61556494.html
[xi]Cf: https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/08/06/anne-hidalgo-avec-les-jo-les-gens-se-disent-c-est-pas-completement-foutu-on-peut-etre-ensemble-et-on-peut-etre-heureux-ensemble_6269386_823448.html ;
[xii]Cf: https://www.liberation.fr/societe/jeux-olympiques-12-545-personnes-ont-ete-expulsees-dile-de-france-les-associations-denoncent-un-nettoyage-social-20240603_C5SB3DJ6CZGX7BVRZMMDAK43EQ/#mailmunch-pop-1146266
[xiii]J'en ai parlé dans un autre texte : Lyra de Carvalho, Frederico « Un monde de soldats et d'étrangers » https://urucum.milharal.org/2018/03/29/um-mundo-de-soldados-e-estrangeiros/
[Xiv]Cf: https://www.mediapart.fr/journal/france/250724/aux-jo-2024-un-usage-sans-precedent-des-drones-et-des-algorithmes-de-surveillance e https://www.tf1info.fr/jeux-olympiques/video-45-000-policiers-et-gendarmes-deployes-paris-sous-un-quadrillage-serre-avant-l-ouverture-des-jeux-2309557.html
[xv]https://www.bfmtv.com/politique/gerald-darmanin-les-moyens-dans-la-securite-mis-en-place-a-saint-denis-resteront-apres-jeux-olympiques_VN-202408020182.html
[Xvi]Bréville, Benoît; Halimi, Serge et Rimbert, Pierre, « Nous y sommes », Le Monde Diplomatique, 844, juillet 2024. Cet article fait partie d'un dossier intitulé : La France, de la crise au chaos politique.
[xvii]Pour des raisons évidentes, depuis février 2022, le RN tente de cacher les relations intimes qu'il a toujours entretenues avec la Russie de Poutine. Cette relation semble cependant plus importante dans la manière de situer le parti dans le champ complexe de la politique institutionnelle européenne et dans l’alliance internationale de l’extrême droite, sans grand poids par rapport à la situation intérieure de la France. Cependant, ce n'est pas ce que pensent une partie de la gauche et de la droite libérales qui, au lieu de s'intéresser aux transformations politico-sociales qu'a connues le pays, préfèrent la voie la plus facile consistant à souligner les liens réels du RN avec la Russie comme l'un des principaux liens supposés avec la Russie. causes de la dérive électorale française.
Par exemple, https://www.nouvelobs.com/politique/20240618.OBS89944/le-rn-et-la-russie-une-longue-histoire-d-amour-qui-n-est-pas-terminee.html e https://basta.media/bots-manipulations-chercheurs-pointent-campagne-kremlin-pour-faire-elire-RN-legislatives-ingerence-russe
[xviii]Faury, Félicien, Des électeurs ordinaires. Enquête sur la normalisation de l'extrême droite, Paris, Seuil, 2024). La quantité d’études sur l’extrême droite française est particulièrement dense et riche ; même si toutes ces connaissances sont difficiles à traduire en actions politiques visant à contenir ou même à inverser la tendance. Une autre contribution fondamentale est le livre d'Ugo Palheta, La possibilité du fascisme. La France, la trajectoire du désastre (Paris, La Découverte, 2018).
[xix]Dans un article de Le Monde Diplomatique le travailleur et ancien candidat à la présidentielle pour Nouveau Parti Capitaliste, Philippe Poutou a souligné que le gouvernement utilise le mépris de classe comme une arme politique dans le but de démoraliser toute lutte sociale et résistance aux réformes et la guerre sociale qu'il mène contre la population du pays. Malgré tout, en 2023, le gouvernement aurait été acculé par l’immense protestation nationale contre la réforme des retraites, même si cela n’a pas suffi à le dissuader d’utiliser la procédure 49.3 pour l’approuver contre le parlement et la population. (Cf : Poutou, Philippe, « Mais que faut-il pour gagner ? », Le Monde Diplomatique, n. 841, avril 2024
[xx] Cet article s’inscrit dans le cadre d’un projet de recherche sur la France contemporaine mené à l’Institut Alameda.
la terre est ronde il y a merci à nos lecteurs et sympathisants.
Aidez-nous à faire perdurer cette idée.
CONTRIBUER