Par Airton Paschoa*
Maison d'arrêt
Les vieux boudent comme des enfants. Les premiers parce qu'ils ont volé le soleil et les derniers parce qu'ils ont emporté les rayons et les grondements. Certains travaillant plus, d'autres moins, les adultes passent jour et nuit à rire d'appréhension. Les mûrs mûrissent, attendant beaucoup de temps pour pourrir. Les jeunes ne se conforment pas; ils n'ont rien fait et ne peuvent rien faire. Le pénitencier à ciel ouvert, tant le prenaient pour la liberté... quant à la liberté ils prenaient le régime semi-ouvert dans lequel ils vivaient. Combien, qu'importe si le soleil se lève carrément ? soit une forme actuelle de suprématisme, soit une forme ouverte d'autisme suprême.
principe
toujours le même et unique
je tremble et frissonne
les millions de matins qui se sont levés
les milliers de matins qui pointaient
espérer espérer
même pas à quel point
à l'avers opposé
de lance
de lame
du découragement
fatigué le coeur
frapper et attraper
éléphantiasis
coffre et coffre
le temps insensé
[conseil]
vagues de chaleur
les ondes radio
vagues de haine
vagues de peur
ondes moyennes
et juste repasser
le tableau
géologique
C'était pour récupérer cette époque.
Aucune pierre non retournée.
Pas même la colère.
Pas même le lierre.
suite
L'Impossible, l'impensable impossible, ce qui raye le ciel et déchire le voile, ce qui saute le temps et palpite au temple, ce qui se cambre, ce qui se révèle et se défait, ce qui est arc et est iris, ce qui tend la ficelle et coupe la parole et coupe au couteau, impossibilité impassible, qu'est-ce que c'est, sinon qu'est-ce qui touche le celo ?
Dictature
Disons que chaque matin rachète chaque matin. Sinon… Non. Il ne peut y avoir d'alternative. S'il y a… Nous devons nier, nier. Il faut instituer le matin comme unité de temps, comme seule unité de temps ! Oui, sans exception. Pas de possibilité de licenciement. Il faut croire que chaque matin absout chaque matin, que chaque matin, aveuglément, pieusement croire que chaque matin rachète chaque matin. Jour après jour. Nous avons besoin, nous avons besoin. Nous avons besoin de croire. Nous devons décréter. Il faut oublier, il ne faut pas oublier, il faut instaurer la dictature du matin.
*Airton Paschoa est écrivain, auteur, entre autres livres, de la vie des pingouins (Nankin, 2014).