Georg Lukács sur Hölderlin et Thermidor

Paris, le 24/02/2014. Portrait par Michael Lowy .Photo Pierre Pytkowicz
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Par MICHAEL LÖWY*

Répondre à un article de Slavoj Žižek

Les écrits de Georg Lukács dans les années 1930, malgré leurs limites, leurs contradictions et leurs engagements (avec le stalinisme), sont toujours du plus grand intérêt. C'est notamment le cas de son essai de 1935 sur Hölderlin intitulé « La Hypérion par Hölderlin », traduit par Lucien Goldmann et inclus dans le volume Goethe et son temps (1949).

Lukács est littéralement fasciné par le poète, qu'il décrit comme « l'un des poètes élégiaques les plus purs et les plus profonds de tous les temps », dont l'œuvre a « un caractère profondément révolutionnaire ».[I]. Mais, contrairement à l'opinion générale des historiens de la littérature, il refuse obstinément de le reconnaître comme un auteur romantique. Pourquoi?

Dès le début des années 1930, Lukács a compris, avec une grande lucidité, que le romantisme n'était pas une simple école littéraire, mais une protestation culturelle contre la civilisation capitaliste, au nom de valeurs - religieuses, éthiques, culturelles - du passé. Il était en même temps convaincu que, d'après ses références passées, il s'agissait d'un phénomène essentiellement réactionnaire.

Le terme « anticapitalisme romantique » apparaît pour la première fois dans un article de Lukács sur Dostoïevski, dans lequel l'écrivain russe est condamné comme « réactionnaire ». Selon ce texte publié à Moscou, l'influence de Dostoïevski tient à sa capacité à transformer les problèmes de l'opposition romantique au capitalisme en problèmes « spirituels » ; De cette « opposition intellectuelle petite-bourgeoise anticapitaliste romantique (…), une large voie s'ouvre vers la droite, vers la réaction, aujourd'hui contre le fascisme, et, au contraire, une voie étroite et difficile vers la gauche, vers la gauche. « pour la révolution »[Ii].

Ce « chemin étroit » semble disparaître quand, trois ans plus tard, il écrit un essai sur « Nietzsche, le précurseur de l'esthétique fasciste ». Lukács présente Nietzsche comme continuant la tradition des critiques romantiques du capitalisme : comme eux, « il oppose, à chaque instant, au manque de culture du présent la haute culture des périodes précapitalistes ou du début du capitalisme ». Pour lui, cette critique est réactionnaire, et pourrait facilement conduire au fascisme.[Iii].

On retrouve ici un aveuglement surprenant : Lukács ne semble pas percevoir l'hétérogénéité politique du romantisme et, en particulier, l'existence, à côté du romantisme réactionnaire, qui rêve d'un impossible retour vers le passé, d'un romantisme révolutionnaire, qui aspire à un détour à travers le passé, vers un futur utopique. Ce refus est d'autant plus surprenant que les travaux du jeune Lukács lui-même, par exemple, son essai La théorie du roman (1916) appartient à cet univers culturel romantique/utopique[Iv].

Ce courant révolutionnaire est présent depuis les origines du mouvement romantique. Prenons comme exemple Les origines de l'inégalité entre les hommes de Jean-Jacques Rousseau (1755), que l'on peut considérer comme une sorte de premier manifeste du romantisme politique : sa critique acharnée de la société bourgeoise, des inégalités et de la propriété privée est faite au nom d'un passé plus ou moins imaginaire, l'État de Nature (toujours inspirée des coutumes libres et égalitaires du peuple indigène « Caraíbas »). Cependant, contrairement à ce que soutiennent ses adversaires (Voltaire !), Rousseau ne propose pas que les hommes modernes retournent dans la forêt, mais rêve d'une nouvelle forme d'égalité libertaire pour les « sauvages » : la démocratie. On retrouve le romantisme utopique, sous des formes diverses, non seulement en France mais aussi en Angleterre (Blake, Shelley) et même en Allemagne : le jeune Schlegel n'était-il pas un ardent partisan de la Révolution française ? C'est aussi le cas, certes, de Hölderlin, poète révolutionnaire, mais qui, comme beaucoup de romantiques après Rousseau, est possédé par « la nostalgie des jours d'un monde originel » (un moment dans les événements de l'Urwelt)[V].

Lukács est obligé de reconnaître, à contrecœur, que l'on retrouve chez Hölderlin les « traits romantiques et anticapitalistes qui, à cette époque, n'avaient pas encore un caractère réactionnaire ». Par exemple, l'auteur de Hypérion il détestait aussi, comme les romantiques, la division capitaliste du travail et l'étroite liberté politique bourgeoise. Cependant, « dans son essence, Hölderlin (…) n'est pas un romantique, bien que sa critique du capitalisme naissant ne soit pas dépourvue de certains traits romantiques »[Vi]. On perçoit dans ces vers qui affirment une chose et son contraire, l'embarras de Lukács et sa difficulté à montrer clairement la nature romantique révolutionnaire du poète. Au début, le romantisme « n'avait-il pas encore un caractère réactionnaire » ? Cela signifie que tout Frühromantique, la première période du romantisme, à la fin du XVIIIe siècle, n'était-elle pas réactionnaire ? Dans ce cas, comment affirmer que le romantisme est, par nature, un courant rétrograde ?

Dans sa tentative, contre toute évidence, de dissocier Hölderlin des romantiques, Lukács mentionne le fait que le passé auquel ils se réfèrent n'est pas le même : « La différence dans le choix des thèmes entre Hölderlin et les écrivains romantiques – la Grèce contre le Moyen Les âges – ce n'est donc pas une simple différence de thèmes, mais une différence de vision du monde et d'idéologie politique » (p. 194). Pourtant, si beaucoup de romantiques se réfèrent au Moyen Âge, ce n'est pas le cas de tous : par exemple, Rousseau, on l'a vu, s'inspire du mode de vie des « Caraïbes », ces hommes libres et égaux. On trouve d'ailleurs des romantiques réactionnaires qui rêvent de l'Olympe de la Grèce classique. Si l'on tient compte du soi-disant « néo-romantisme » de la fin du XIXe siècle – en fait, la continuation du romantisme sous une nouvelle forme – on trouve d'authentiques romantiques révolutionnaires – le marxiste libertaire William Morris et l'anarchiste Gustav Landauer – fascinés par le Moyen Age.

En fait, ce qui distingue le romantisme révolutionnaire du romantisme réactionnaire n'est pas le type de passé auquel il se réfère, mais la dimension utopique du futur. Lukács semble s'en rendre compte, dans un autre passage de son essai, lorsqu'il évoque la présence concomitante, chez Hölderlin, d'un « rêve de retour à l'âge d'or » et d'une « utopie au-delà de la société bourgeoise, d'une véritable libération de l'humanité ».[Vii]. Il perçoit aussi, avec perspicacité, la parenté entre Hölderlin et Rousseau : chez l'un et l'autre on retrouve « le rêve d'une transformation de la société », par laquelle celle-ci « redeviendrait naturelle ».[Viii]. Lukács est donc très près d'envisager la génie Le romantisme révolutionnaire de Hölderlin, mais son préjugé catégorique contre le romantisme, catalogué comme « réactionnaire » par définition, l'empêche d'arriver à cette conclusion. C'est selon nous l'une des principales limites de cet essai par ailleurs brillant...

L'autre limite concerne davantage le jugement historico-politique de Lukács sur l'irréductible – post-termidorien – jacobinisme de Hölderlin, comparé au « réalisme » de Hegel : « Hegel accepte l'époque post-termidorienne, la fin de la période évolutive de la Révolution française, et construit sa philosophie précisément sur la compréhension de ce nouveau tournant dans l'évolution de l'histoire universelle. Hölderlin ne transige pas avec la réalité post-thermidorienne ; il reste fidèle au vieil idéal révolutionnaire d'un renouveau de la démocratie antique et est écrasé par une réalité qui n'avait plus de place pour ses idéaux, pas même sur le plan poétique et idéologique ».

Alors que Hegel comprenait « l'évolution révolutionnaire de la bourgeoisie comme un processus unitaire, dont la terreur révolutionnaire, comme Thermidor et l'Empire, n'étaient que des phases nécessaires », l'intransigeance de Hölderlin « menait à une impasse tragique. Inconnu, ne pleure pour personne, il est tombé comme un Léonidas poétique et solitaire, des idéaux de l'époque jacobine aux Thermopyles de l'invasion thermidorienne.[Ix].

Avouons que cette fresque historique, littéraire et philosophique ne manque pas de grandeur ! Elle n'en est pas moins problématique… Et, surtout, elle contient implicitement une référence à la réalité du processus révolutionnaire soviétique, tel qu'il était au moment où Lukács écrivait son essai.

C'est en tout cas l'hypothèse un peu risquée que j'ai essayé de défendre dans un article publié en anglais sous le titre Lukács et le stalinisme, et repris dans un livre collectif, Le marxisme occidental, un lecteur critique (Londres, New Left Books, 1977). Je l'ai également inclus dans mon livre sur Lukács, publié en français en 1976 et en Angleterre en 1980 sous le titre Georg Lukàcs. Du romantisme au bolchevisme. Voici un passage qui résume mon hypothèse sur la fresque historique esquissée par Lukács dans l'article sur Hölderlin : « Le sens de ces observations par rapport à l'URSS en 1935 est transparent ; qu'il suffise d'ajouter que Trotsky publie précisément en février 1935 un essai dans lequel il utilise pour la première fois le terme « Thermidor » pour caractériser l'évolution de l'URSS après 1924 (L'État ouvrier face à la question de thermidor et du bonapartisme). De toute évidence, les passages cités sont la réponse de Lukács à Trotsky, ce Léonidas intransigeant, tragique et solitaire, qui refuse Thermidor et est condamné à une impasse. Lukács, en revanche, comme Hegel, accepte la fin de la période révolutionnaire et fonde sa philosophie sur la compréhension du nouveau tournant de l'histoire universelle. Notons cependant au passage que Lukács semble accepter implicitement la caractérisation trotskiste du régime de Staline comme thermidorien… »[X].

Cependant, c'est avec une certaine surprise que j'ai lu, dans un livre récent de Slavoj Žižek, un passage de l'essai de Lukács sur Hölderlin, qui reprend, presque mot pour mot, mon hypothèse, mais sans en citer la source :

« Il est évident que l'analyse de Lukács est profondément allégorique : elle a été écrite quelques mois après que Trotsky ait lancé sa thèse selon laquelle le stalinisme était le Thermidor de la Révolution d'Octobre. Le texte de Lukács doit être lu comme une réponse à Trotsky : il accepte la définition du régime stalinien comme « thermidorien », mais lui donne un sens positif. Plutôt que de déplorer la perte de l'énergie utopique, nous devrions, de façon héroïquement résignée, accepter ses conséquences comme le seul véritable espace de progrès social.[xi].

Je ne crois pas que M. ižek peut avoir lu mon livre sur Lukács, mais il a probablement pris connaissance de mon analyse dans l'article publié dans la collection largement diffusée Western Marxism. Comme M. Žižek écrit beaucoup, et vite, on comprend qu'il n'ait pas toujours le temps de citer ses sources...

trimer ižek fit de nombreuses critiques à Lukács, parmi lesquelles celle-ci, assez paradoxale : Lukács « devint, après les années 1930, le philosophe stalinien idéal qui, pour cette raison précise et contrairement à Brecht, laissa de côté la véritable grandeur du stalinisme »[xii]. Ce commentaire se trouve dans un chapitre de son livre curieusement intitulé La grandeur intérieure du stalinisme – titre inspiré de l'argument de Heidegger sur la « grandeur intérieure du nazisme », dont Žižek prend ses distances en déniant à juste titre toute « grandeur intérieure » au nazisme.

Pourquoi Lukács n'a-t-il pas compris cela "grandeur » du stalinisme ? Žižek n'explique pas, mais il sous-entend que l'identification du stalinisme avec Thermidor – proposée par Trotsky et implicitement acceptée par Lukács – était une erreur. Par exemple, pour lui, « l'année 1928 a été un tournant inquiétant, une véritable seconde révolution – pas une sorte de Thermidor, mais plutôt la radicalisation conséquente de la Révolution d'Octobre »… Ainsi, Lukács et, de même, tous ceux qui n'ont pas comprendre « la tension insoutenable du projet stalinien lui-même » n'a pas réalisé sa « grandeur » et n'a pas compris « le potentiel émancipateur-utopique du stalinisme » ![xiii] Morale de l'histoire : il faut « arrêter le jeu ridicule qui consiste à opposer la terreur stalinienne à l'héritage 'authentique' léniniste » - un vieil argument trotskyste repris par « les derniers trotskystes, ces vrais Hölderlins du marxisme actuel »[Xiv].

Slavoj Žižek était-il le dernier des staliniens ? Difficile d'y répondre, tant sa pensée gère, avec un talent considérable, paradoxes et ambiguïtés. Que penser de ses proclamations grandioses sur la « grandeur intérieure » du stalinisme et son « potentiel utopiste-émancipateur » ? Il me semble qu'il aurait été plus juste de parler de « médiocrité intérieure » et de « potentiel dystopique » du système stalinien… La réflexion de Lukács sur Thermidor me semble plus pertinente, même si elle est aussi discutable.

Mon commentaire, dans l'article « Lukács et le stalinisme » (et dans mon livre), à ​​propos de l'ambitieuse fresque historique de Lukács, à propos de Hölderlin, tente de remettre en cause la thèse de la continuité entre la Révolution et Thermidor : « Ce texte de Lukács constitue sans doute une des tentatives les plus intelligentes et les plus subtiles pour justifier le stalinisme comme une « phase nécessaire », « prosaïque » mais « de caractère progressiste », de l'évolution révolutionnaire du prolétariat, conçue comme un processus unitaire. Il y a dans cette thèse – qui était probablement le raisonnement secret de nombreux intellectuels et militants plus ou moins liés au stalinisme – un certain « noyau rationnel », mais les événements des années suivantes (procès de Moscou, pacte germano-soviétique, etc. .) montrerait, même pour Lukács, que ce processus n'était pas si 'unitaire' ». J'ajoute, en note de bas de page, que le vieux Lukács, dans une interview à la New Left Review en 1969, a une vision plus lucide qu'en 1935 de l'Union soviétique : son extraordinaire pouvoir d'attraction a duré « de 1917 jusqu'à l'époque de la Grande purges »[xv].

Mais revenons à Žižek : les questions posées par son livre ne sont pas uniquement historiques : elles concernent la possibilité même d'un projet communiste émancipateur basé sur les idées de Marx (et/ou de Lénine). En effet, selon l'argument qu'il avance dans l'un des passages les plus étranges de son livre, le stalinisme, avec toutes ses horreurs (qu'il ne nie pas), était finalement un moindre mal que le projet marxiste originel ! Dans une note de bas de page, Žižek explique que la question du stalinisme est souvent mal placée : « Le problème n'est pas que la vision marxiste originale ait été subvertie par des conséquences imprévues. Le problème est cette vue elle-même. Si le projet communiste de Lénine – ou même de Marx – avait été pleinement réalisé, selon son véritable noyau, les choses auraient été bien pires que le stalinisme – nous aurions une vision de ce qu'Adorno et Horkheimer appelaient die verwaltete Welt (la société administrée). , une société totalement transparente à elle-même, régulée par le general intellect réifié, d'où toute prétention d'autonomie et de liberté aurait été bannie »[Xvi].

Il me semble que Slavoj Žižek est très modeste. Pourquoi cacher dans une note de bas de page une telle découverte historico-philosophique, dont l'importance politique est évidente ? En fait, les adversaires libéraux, anticommunistes et réactionnaires du marxisme se bornent à le rendre coupable des crimes du stalinisme. Žižek est, pour autant que je sache, le premier à soutenir que si le projet marxiste original avait été pleinement réalisé, le résultat aurait été pire que le stalinisme…

Faut-il prendre cette thèse au sérieux, ou ne vaudrait-il pas mieux l'attribuer au goût immodéré de Slavoj Žižek pour la provocation ? Je ne saurais répondre à cette question, mais je penche pour la deuxième hypothèse. En tout cas, j'ai du mal à prendre au sérieux cette affirmation assez absurde – un scepticisme sans doute partagé par ceux – notamment les jeunes – qui continuent de s'intéresser, encore aujourd'hui, au projet marxiste originel.

*Michael Lowy il est directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (France). Auteur, entre autres livres de L'évolution politique de Lukács 1909-1929 (Cortés).

Traduction: Fernando Lima das Neves

notes

[I] G. Lukács, "L'Hyperion" de Hölderlin", Goethe et son époque, Paris, Nagel, 1949, p. 197.

[Ii] G. Lukács, "Über den Dotsojevski Nachlass",  Moskauer Rundschau,  22 / 3 / 1931.

[Iii] G. Lukács, « Nietzsche als Vorläufer des faschistischen Aesthetik » (1934), in F. Mehring, G. Lukács, Friedrich Nietzsche, Berlin, Aufbau Verlag, 1957, p. 41-53.

[Iv] Voir M.Löwy, R.Sayre, « Le romantisme (anticapitaliste) dans La théorie du roman par G. Lukács », dans Romanesques, Revue du Centre d'études du roman, Paris, Classiques Garnier, n° 8, 2016, « Lukács 2016 : cent ans de Théorie du roman ».

[V] Hôlderlin, Hypérion, 1797, Francfort-sur-le-Mein, Fischer Bücherei, 1962, p. 90. Pour une discussion du concept de romantisme anticapitaliste et de ses diverses manifestations politiques, voir M. Löwy, R. Sayre, Révolte et mélancolie. Le romantisme à contre-courant de la modernité,  Paris, Payot, 1990.

[Vi]  G. Lukács,  Hypérion, lep.cit., p. 194

[Vii]  G. Lukács,  op.cit., p. 183

[Viii] Ibid., p.182.

[Ix]  G. Lukács,  op.cit., p. 179-181

[X]  M. Lowy, Pour une sociologie des intellectuels révolutionnaires. L'évolution politique de Lukács 1909-1929, Paris, PUF, 1976, p. 232.

[xi]  S. ižek, La révolution aux portes, Paris, Le Temps des Cerises, 2020, p. 404.

[xii]  S. ižek, op.cit,  p. 257

[xiii]  S. ižeksur. cit., note 49, p. 419.

[Xiv]  S. ižek , op.cit., p. 250-52

[xv] M. Lowy, G. Lukács, op.cit.,P. 233. Il est vrai que les massacres de collectivisation forcée du début des années 1930 étaient peu connus en dehors de l'URSS.

[Xvi] S.Zizek, op. cit., note 47, p. 419.

 

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