Le rôle formateur de la littérature

John Latham, Système de croyance, 1959
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Par PAULO FRANCHETTI*

Critique d'un article publié dans Folha défendant la liste Fuvest

1.

Dans un post sur ma page Facebook, j'ai enregistré mes premières impressions en lisant un article rédigé par Maria Arminda do Nascimento Arruda, Aluísio Cotrim Segurado et Gustavo Ferraz de Campos Monaco, publié à la p. 3 du journal Folha de S. Paul, le 17 décembre 2023, intitulé « Fuvest et la marginalité des écrivains ». Il s'agit respectivement du vice-recteur de l'USP, du vice-recteur des études de premier cycle et du directeur exécutif de la Fuvest.

J'ai été frappé par le manque de cohérence du texte, la légèreté des arguments et l'arrogance avec laquelle trois professeurs – aucun d'entre eux ne se distinguait par ses travaux théoriques ou critiques littéraires – ont traité une question complexe, qui a déclenché un débat sérieux, réunissant plusieurs intellectuels d’une pertinence incontestée dans le domaine.

2.

Ce que j'ai écrit, sur un ton cohérent avec le véhicule, était ceci :

Je viens de lire, quelque peu amusé et perplexe, un article signé par trois autorités de l'USP. Le sujet est la liste des auteurs à lecture obligatoire pour l'examen d'entrée. J'y lis par exemple que « traditionnellement, le canon littéraire valorise les auteurs déjà établis ». Il est difficile d’imaginer ce que voulaient dire les auteurs. Tradition, canon et consécration y apparaissent dans une lapissada ridicule. Nous pouvons faire des variations avec ces termes. La tradition valorise les auteurs renommés, la tradition est la consécration des auteurs, les auteurs renommés sont la tradition ; le canon valorise la tradition, le canon est la tradition, le canon est la consécration.

On pourrait penser du côté opposé : le canon a valorisé les auteurs non consacrés, le canon a valorisé les œuvres non traditionnelles, la tradition est composée d'auteurs non consacrés ou non canoniques. Je me demande quels concepts de tradition, de canon et de consécration ont été mobilisés dans cette affirmation. Mais j'avoue que je ne peux pas... Pourtant, la lecture d'autres passages de l'article permet de comprendre. C'est là que vous pouvez trouver la fierté dans son intégralité.

Il est vrai qu’il semble y avoir eu une époque où l’Université de São Paulo avait, de par ses chaires, le pouvoir ou l’illusion de créer ou de guider le canon. Mais je crois qu'il est temps d'affirmer avec certitude que la marginalisation des auteurs au lycée est due au fait qu'ils « ne font pas partie des exigences du Fuvest ».

Il précise également que l'engagement du Fuvest est de « suivre l'avancement des connaissances et d'encourager l'enseignement secondaire à absorber la recherche la plus avancée ». Or, en plus de ce que j'ai déjà souligné, il suffit de contraster cette affirmation avec les noms qui composent la pétition à laquelle répond ce texte. En fait, nous y trouvons une liste de critiques et de professeurs (pour la plupart issus de l’USP elle-même) qui développent sans aucun doute ce que l’on entend par « recherche plus avancée » dans le domaine des études littéraires.

Enfin, il est aussi puéril de dire que la liste des femmes est apparue comme un remède au fait que les étudiants lisaient des résumés et non les ouvrages (car si tel est le cas, il est clair qu'ils liront désormais des résumés des livres par les auteurs indiqués). auteurs), car le choix n’est pas qu’il ait un caractère ostensiblement militant – ce qui n’est vrai que si l’on admet que la démagogie et le populisme s’opposent au militantisme déclaré.

Ce qui, à bien y réfléchir, rejoint cette brillante découverte selon laquelle « traditionnellement, le canon littéraire valorise les auteurs déjà établis ». Le niveau d'argumentation des trois autorités de l'USP corrobore non seulement ce qui était déjà évident dans les entretiens avec le directeur exécutif de la Fuvest, à savoir le manque de préparation et le manque de contrôle sur le domaine littéraire, mais aussi l'autonomie de la bureaucratie ( les kiosques à journaux sont l'un des secrets les mieux gardés !), au détriment du débat ouvert et de la valorisation de la compétence scientifique dans ce qui était, à une époque, un modèle de l'université brésilienne.

3.

Il y aurait cependant plus à dire sur l’article superficiel sur lequel le message a commenté.

Un point qui mérite attention est involontairement souligné dans l’article. En effet, il y est précisé que « composer la liste de lectures obligatoires de la Fuvest confère du prestige aux auteurs, aux maisons d'édition et est une composante de la construction du canon littéraire ». La continuité est typique non sequitur: "La réaction à la liste récemment publiée est un exemple éloquent en ce sens." En d’autres termes : les réactions à la liste constituent-elles un exemple du pouvoir de prestige du Fuvest ? Seulement si c'est au sens habituel dans les agences de publicité, que toute mention, positive ou négative, fait connaître et promeut le produit.

Car c’est bien d’un produit dont on parle lorsqu’on évoque les « maisons d’édition ». Car lorsqu’il s’agit d’œuvres « classiques » du domaine public, la nomination de l’une d’elles ne favorise aucune maison d’édition. Cela ne se produit que lorsque sont indiquées des œuvres pleinement valables au titre du droit d'auteur, c'est-à-dire des œuvres qui sont le monopole d'éditeurs ayant signé des contrats d'exclusivité avec les auteurs ou leurs héritiers. Je crois qu’il ne serait ni injuste ni inapproprié de remplacer le « prestige » par le « profit » dans ce cas.

Cette question n’est même pas abordée par les autorités de l’USP, ravies de leur prétendu pouvoir de canonisation et oubliant commodément que les maisons d’édition dont les auteurs sont choisis comme lecture obligatoire par des milliers d’étudiants leur sont reconnaissantes, car elles y gagnent bien plus que du prestige. Il en va de même pour les auteurs vivants ou leurs héritiers.

Tout l’article repose sur la vantardise arrogante du (supposé, je le répète) pouvoir culturel de l’USP, oubliant que le soi-disant comité secret qui élit les auteurs et les rédactions est contesté, du moins dans ce choix de la liste féministe, par plusieurs des professeurs de littérature les plus remarquables de l'université elle-même.

Un autre point important à discuter, en gardant à l’esprit une liste si remise en question non seulement à cause de ce qu’elle exclut, mais aussi parce qu’elle inclut une œuvre qui n’est pas fictive, mais issue d’un ancien militantisme féministe, est la nécessité ou l’exigence même de listes de livres obligatoires.

Le texte aborde à nouveau le problème, sans apparemment en tenir compte, lorsqu'il affirme que « ces dernières années, on a constaté que les nouvelles générations ne sont pas habituées à lire les œuvres dans leur intégralité, préférant les informations contenues dans des résumés qui finissent par appauvrir l'éducation des étudiants, éliminant ainsi l’espace de réflexion et d’imagination qu’offre l’accès direct aux œuvres ». Or, je crois que la pratique des résumés est une fonction directe de l'existence des listes.

Et un point très important dans la discussion des effets sur l’enseignement secondaire n’est même pas mis en avant : pourquoi avoir des listes d’ouvrages ? L'examen d'entrée est un examen public. Étant une compétition, elle a un programme. Ne semble-t-il pas beaucoup plus raisonnable d'énumérer dans le programme des problèmes et des sujets qui stimulent la lecture, l'imagination et la réflexion ? De mon point de vue, la liste des livres obligatoires est une simplification qui ne contribue en rien à diffuser le goût de la lecture ou la réflexion sur la littérature et la culture.

À qui sert-il alors ? Il sert une seule et même illusion, qui laisse une trace tout au long de l'article et constitue son seul lest : que l'USP (ou Unicamp, qui publie également des listes) peut, par ce biais, influencer positivement l'enseignement secondaire. Mais le document lui-même dément tout espoir, dans la mesure où il reconnaît que les résumés (et le secteur des écoles secondaires, je dirais) répondent aux besoins de l'examen d'entrée. En ce sens, il ne faut pas beaucoup d’effort intellectuel pour conclure que la recommandation de livres plutôt que de problèmes littéraires et culturels va dans la direction opposée à celle souhaitée par les auteurs.

Il resterait peut-être à dire que le directeur exécutif du Fuvest présente, de l'étude et de l'enseignement de la littérature, une vision aussi banale que l'article qu'il soutient avec les autres : dans une interview lors de la publication de la liste, il a soutenu que, avec ces auteurs et ces livres, on pourrait continuer à enseigner dans les écoles littéraires. D'après ce que nous avons vu, il s'agit peut-être du même niveau que la commission très secrète qui a dressé la liste capitale, puisqu'aucun de ses membres n'a apporté aucune aide aux trois autorités, pour les empêcher de s'exposer au ridicule.

En fait, je ne pense pas que cela vaille la peine de continuer à analyser et à commenter cet article faible écrit par six mains (quatre hommes et deux femmes d'ailleurs). Ce qui a déjà été révélé semble suffire à démontrer pleinement à quel point c'est moins cher, dans le cadre du Fuvest (et, heureusement, comme le montre le Lettre ouverte posté sur le site la terre est ronde, pas dans les départements concernés de l'USP) la discussion sur le rôle formateur ou informatif de la littérature à l'école.

*Paulo Franchetti Il est professeur au département de théorie littéraire de l'Unicamp. Auteur, entre autres livres, de À propos de l'enseignement de la littérature (éditeur Unesp) [https://amzn.to/47cgf2M]


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