Par THAIS KLEIN & ÉRICO ANDRADE*
Ce qui est au cœur des attaques contre Bolsonaro et Trump n’est pas une organisation coordonnée par une internationale fasciste, mais la violence comme moyen de gérer les différends.
L'une des caractéristiques de la violence est qu'elle est le pouvoir de l'arbitre. Pouvoir de décider de l’élimination de ce qui s’oppose à ce que l’on désire, de ce qui menace un narcissisme fragile. En ce sens, la violence est marquée par l’attribution d’un pouvoir sur la vie en réaffirmant la capacité de la destituer.
Peut-être donc la violence peut-elle être une impulsion mortelle dirigée contre les autres, mais dans le but de s’affirmer soi-même. Affirmation de la place de celui qui a la responsabilité de diriger la violence sans laquelle il n'est pas possible de reconnaître l'autre comme celui qui est faible et objet de la violence. La violence affirme la place de celui qui fait violence.
L’extrême droite a pour moyen d’opérer la violence, de se reproduire et de s’ériger en masse. Cela se remarque notamment dans le soutien aux armes et aux fantasmes de toute-puissance – des hommes qui ne trichent pas. Cette construction se présente comme si tous les hommes étaient invincibles et immunisés contre la violence qu’ils produisent eux-mêmes. Comme si le pacte de force brutale pouvait ôter du terrain toute possibilité qu’il se retourne contre ceux qui le promeuvent au niveau idéologique et dans la praxis sociale.
En fait, il semble qu’il soit plus facile de croire à un complot dont se nourrit l’extrême droite elle-même qu’à comprendre que la violence se définit par son manque de contrôle. Il semble que l’on donne encore plus de pouvoir à l’extrême droite quand on ne considère pas que, malgré leur discours de toute-puissance, ils sont aussi humains et vulnérables que nous le sommes tous.
Considérer la violence dirigée contre les dirigeants d’extrême droite comme des cas isolés ou comme une grande conspiration, c’est aller de pair avec le discours de la toute-puissance. On ne se rend pas compte que la promotion de la violence est également traversée par cela. Soutenir un discours qui prêche la violence, c’est promouvoir ses effets à travers le monde comme si la violence n’impliquait pas la participation d’agents intentionnels.
La toute-puissance de l’extrême droite construit un discours qui l’éloigne de toute possibilité d’être responsable des effets néfastes de ses actes de violence, tout en tentant de cacher la vulnérabilité qui l’affecte également. Ce n’est qu’en position de victime que l’extrême droite peut s’approprier ce qu’elle promeut, puisque c’est en position de victime qu’elle justifie le recours à la force.
La logique est divisée, elle produit une erreur : la victimisation comme seule manière de représenter l’action de la violence finit par servir de moteur au discours de haine lui-même, qui est toujours dirigé contre d’autres qui ne composent pas le groupe. Le paradoxe est que la violence vise à détruire l’autre, mais dépend de l’autre pour s’affirmer comme attribution d’un pouvoir sur la vie et réaffirmation de la capacité de le destituer.
Ce qui est au cœur des attaques contre Jair Bolsonaro et Donald Trump n’est pas une mise en place coordonnée par une internationale fasciste, mais la prise de conscience que la violence ne peut être contrôlée lorsqu’elle est une manière propagée de gérer les différences. L’extrême droite non seulement prouve son propre poison, mais renforce également la certitude que le discours de haine peut produire des martyrs et des agresseurs qui prendront la société en otage par ceux qui cherchent à la détruire.
*Thaïs Klein est psychanalyste et professeur au Département de psychologie de l'Université fédérale de Fluminens (UFF).
*Erico Andrade est psychanalyste et professeur de philosophie à l'Université fédérale de Pernambuco (UFPE). Auteur du livre Noirceur sans identité (n-1 éditions) [https://amzn.to/3SZWiYS].
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