Réforme fiscale

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Par RENATO JANINE RIBEIRO*

La réforme fiscale était principalement un programme pour les hommes d'affaires, pas pour les travailleurs ou la gauche.

J'ai vu des commentaires sur le prétendu caractère néolibéral de la réforme fiscale. Je ne suis pas économiste, mais travaillant en théorie politique, je connais quelque chose au néolibéralisme. Je ne le vois pas dans la réforme fiscale.

Celui-ci, d'après ce que j'ai lu, est assez neutre sur la répartition des revenus. On ne peut donc pas dire qu'elle soit progressive. Oui, elle est progressiste, en deux points au moins : la taxation des jets et des yachts ; le paiement de cashback dans certains achats (panier de base ?) par les plus pauvres (ce qui d'ailleurs vaut mieux que d'exonérer le panier, qui est aussi acheté par des non pauvres).

De toute évidence, le marché a préféré modifier la taxe à la consommation avant de modifier l'impôt sur le revenu ou d'en créer un sur les grandes fortunes. Ce qui fait que cette réforme fiscale n'est pas un projet proprement progressiste.

Ce que la réforme fiscale apporte, d'après tout ce que j'ai lu, c'est une simplification administrative. C'est bien, bien sûr. Cela réduira les frais d'administration. Si cela va créer des millions d'emplois, je n'y crois pas. Il va créer oui, mais pas tant que ça. Mais ce que je veux dire, c'est que rien de tout cela ne rend cette réforme néolibérale. Neutre, modérément progressiste, ne veut pas dire néolibéral. Juste ça.

Maintenant, cette réforme fiscale était principalement un programme pour les hommes d'affaires, pas pour les travailleurs ou la gauche, c'est vrai. Encore une fois, un gouvernement progressiste se retrouve dans la situation de faire ce que veulent ceux qui ont voté et même financé l'autre camp. Mais pourquoi?

Je vois deux raisons :

(i) La puissance de feu du capital et de ses médias. Ils créent un ordre du jour. L'agenda du risque au Brésil, les difficultés d'entreprendre etc. et autres choses de ce genre. Ils facturent. Et quand ils le font (par exemple, Dilma Rousseff abaissant les taux d'intérêt et contenant les prix de l'énergie), ils ne sont pas remerciés. Au contraire. Ils sont comme ce dragon Disney qui dévore la génoise sans arrêt.

(ii) L'incompétence de notre bourgeoisie. Elle n'a pas de conscience de classe dans le sens où elle réfléchit à ce qu'est son véritable intérêt, ce qui inclut toujours le long terme. C'est immédiat. Il pense que jouer avec les travailleurs et l'environnement fait plus de profit. Le cas de Lojas Americanas est illustratif. Mais en même temps, idéologiquement, notre peuple a été tellement mis en garde contre le «cummunisme», comme le plaisantait Henfil, qu'il finit par être résolument pro-capitalisme.

Une gauche qui propose une sorte de socialisme meurt en haute mer, elle n'atteint même pas la plage. Et c'est pourquoi la tendance, dans les années 1960 comme dans les administrations Lula, à gauche est d'essayer de clarifier cette bourgeoisie et, en plus, de créer les conditions matérielles pour qu'elle remplisse son rôle. Entrez dans le marché national, un rapport décent au travail, le respect des biomes. Mais elle est ladroite la plus bête du monde», pour citer Guy Mollet à propos de la droite française. Et en agissant ainsi, la gauche court des risques, car la bêtise de cette droite la fait courir dans le giron de l'extrême droite et du coup dès qu'elle ne se sent pas choyée. C'est que justement parce que c'est inepte en termes de projet national, on en arrive là.

Je veux parler davantage du projet national. Tarso Genro était celui qui parlait le plus de lui. Je participe au Forum Interconselhos où le gouvernement écoute les mouvements sociaux pour concevoir un projet pour le Brésil. Economie totalement absente des revendications, bien que le Ministère du Plan soit là, à l'écoute. Les mouvements sociaux demandent de l'argent pour des politiques justes, mais ont une forte aversion pour ce qu'ils appellent le capitalisme.

Mais je me souviens qu'à l'époque de FHC, malgré ses mérites démocratiques, l'idée du projet était qualifiée de Getuliste, arriérée, et mise sur le marché. Cela définirait tout. Je ne sais pas si avoir à nouveau des chantiers navals est bon ou mauvais, mais les arguments contre eux (et contre l'usine de puces brésilienne CEITEC, que Jair Bolsonaro a tenté de détruire et que Lula est en train de recréer) sont très complexes.

Quand vous essayez d'en sortir, vous prenez l'exemple des médias et des économistes du capital. Je ne suis pas économiste, comme vous le savez, mais je sais reconnaître la rhétorique politique, et c'est bien cela : celle de la jouissance à la condition de subalternes (un petit clin d'œil à Lacan, ici).

*Renato Janine Ribeiro est professeur titulaire de philosophie à la retraite à l'USP. Auteur, entre autres livres, de Machiavel, la démocratie et le Brésil (Gare de la liberté).


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