séance spéciale du tribunal

El Lissitzky, Wendingen vol. 4, non. 11 novembre 1921
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Par ARNALDO SAMPAIO DE MORAES GODOY*

Commentaire sur le film réalisé par Costa Gravas

L'« état d'exception » est une période d'anomalie constitutionnelle qui vise à plusieurs reprises à réglementer, limiter et nommer, dans le but de normalisation, en termes constitutionnels et, en fin de compte, également avec des balises juridiques et réglementaires. Cette anormalité dans la conjoncture d'une prétendue normalité en est le trait le plus frappant. Il y a un problème permanent pour la théorie du droit public.

Il y a un dilemme régulateur, une aporie, qui accompagne la conceptualisation et la pratique de « l'état d'exception », qui se retrouve en quelque sorte confiné à des frontières qui seraient censées abstraire la volonté politique de la volonté normative, c'est-à-dire l'action politique elle-même normative. raison. De plus, comme l'a montré l'expérience historique, « l'état d'exception » éblouit ceux qui l'édictent, et qui le veulent définitif. Les expériences de l'Allemagne nazie, du franquisme, du salazarisme, du fascisme, de la France de Vichy et de l'Estado Novo, pour n'en citer que quelques-unes, sont des exemples emblématiques de cette affirmation.

Historiquement, le rôle du pouvoir judiciaire dans « l'état d'exception » est relégué à la simple répétition de formules supposées légales. Le fonctionnement de la justice (sic) dans l'Allemagne nazie, et la performance d'un juge pénal, Roland Freisler, illustrent bien l'affirmation. Le thème est traité de manière récurrente au cinéma. Costa-Gravas, cinéaste français d'origine grecque, a été confronté au problème dans plusieurs films, tels que Z, du Etat de siège, ainsi que de séance spéciale du tribunal.

Ce dernier, tourné en 1975, est particulièrement intrigant, précisément parce qu'il révèle la conception d'un système judiciaire qui, au nom d'une raison d'État imaginaire, laisse de côté les principes les plus élémentaires de la tradition juridique occidentale. Je me réfère, plus objectivement, au fait que le tribunal dépeint dans le film a appliqué une loi rétroactive en matière pénale.

Les faits se seraient produits sous la République de Vichy. C'est l'État français, de 1940 à 1942, dirigé par le maréchal Philippe Pétain. Un modèle de collaboration s'est mis en place avec les envahisseurs de l'Allemagne nazie, de triste mémoire. En sens inverse, la Résistance française, qui avait aussi une participation populaire très importante. C'est un moment marqué par un héroïsme intense. A Vichy (instance hydrominérale bien connue), cependant, elle était régie selon les déterminations de Berlin. C'est dans cet environnement que Costa Gravas s'est installé séance spéciale du tribunal.

Les scènes se déroulent en 1941. Un officier allemand est assassiné à Paris, dans une station de métro, par des résistants. Les insurgés étaient jeunes. En représailles, le gouvernement du Reich a exigé que les autorités locales identifient les assaillants, les punissant sévèrement. Ils ont réclamé la peine de mort. Il y avait une menace contenue dans la demande, à l'effet que les Français seraient exécutés, en représailles, si les suspects n'étaient pas atteints pour une exécution sommaire. Le gouvernement français s'est vu accorder un délai de moins d'une semaine. Le nombre d'exécutions a même été fixé : il devrait y avoir six morts.

Le haut commandement du gouvernement français doit, en premier lieu, rédiger et publier une loi, ayant pour objectif de créer un tribunal d'instance, prescrivant, même, des peines rétroactives. Il y a un conflit entre le ministre de la Justice et le ministre de l'Intérieur. Il s'estimait compétent pour s'occuper de l'affaire. Il a rejeté la conception de cette loi, principalement parce qu'il aurait soutenu une thèse académique plaidant pour l'impossibilité d'une application rétroactive des lois. Sous la pression, il cède au maréchal Pétain (qui d'ailleurs n'apparaît pas dans le film). Convaincu qu'une raison d'État justifiait la mesure, il retravailla sa conception du problème, qui devint un faux problème. Il a ensuite défendu cette cour. Séduit par le pouvoir, il réorganise ses convictions juridiques. C'est le vieux thème des intellectuels et du pouvoir.

Dans l'étape suivante, après avoir rédigé la loi, le ministre a sollicité des membres du pouvoir judiciaire et des procureurs pour lancer le fonctionnement du tribunal. Costa-Gravas illustre le thème de la fascination que le pouvoir exerce sur la bureaucratie traditionnelle, surtout en période exceptionnelle. Il y a eu quelques refus. Certains magistrats et avocats acceptent les nouveaux rôles, toujours motivés par des intérêts personnels, qui dénoncent un éloignement total des paramètres de la décence. Ils savent que c'est un tribunal mis en place pour exécuter des innocents.

La recherche des accusés présumés est tragique. Il n'y avait aucune idée de qui avait commis le meurtre. Ils traduisent en justice les opposants responsables de délits mineurs. Ils choisissent les victimes selon un modèle de triage haineux. Il y avait une prédilection pour l'inculpation des Juifs. Le leadership du gouvernement a fait que les membres de cette cour se considèrent comme des soldats sur le champ de bataille. La condamnation, dans cette logique, était un effort de guerre, douloureux mais nécessaire. Parmi nous, au Brésil, nous connaissons un tribunal infâme qui a fonctionné dans la première phase du gouvernement de Getúlio Vargas, et qui avait, parmi ses juges, des politiciens comme Francisco Campos. Cette cour a été organisée dans le cadre d'un décret signé le 28 mars 1931.

Em la séance judiciaire les séances d'essai ont eu lieu à maison close (portes fermées). L'expression par laquelle ces sessions sont appelées (maison close) est même le titre d'une pièce de Jean-Paul Sartre, écrite en 1944 ; renvoie à toute formule judiciaire qui n'est qu'une parodie. Tout en cachette. Il y a eu des accusés qui ont répondu en distribuant simplement des tracts, des accusations dénuées de toute preuve.

Costa-Gravas photographie le montage d'une guillotine, l'instrument de mort qui sera utilisé. Dans cette séquence, il y a une référence très claire à la procédure historiographique de régression. Symbole d'une résistance glorieuse, la guillotine, qui renvoie l'interprète à l'expérience des Jacobins, devient aussi le symbole d'un acquiescement réactionnaire infâme, qui renvoie le spectateur aux incohérences du temps historique.

séance spéciale du tribunal c'est un film intemporel, posant des problèmes et des dilemmes civilisationnels qui transcendent le temps et l'espace géographique de l'intrigue. La République de Vichy est un moment historique emblématique, en ce sens qu'elle permet de dénoncer la violence des régimes inféodés aux oppresseurs, et qui justifient la servilité dans le vieux mantra de la raison d'État.

* Arnaldo Sampaio de Moraes Godoy est maître de conférences en théorie générale de l'État à la faculté de droit de l'université de São Paulo-USP.

Référence


séance spéciale du tribunal (Rubrique spéciale)

France, 1975, 118 minutes.

Réalisateur : Costa-Gravas.

Avec : Louis Seigner, Roland Bertin, Ivo Garrani, Pierre Doux.

 

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